30 avril 2007

Participez au débat

Le spot tourne depuis quelques jours sur RTL TVI. Dans le cadre de la campagne électorale un panel de citoyens pourra interroger les candidats aux élections législatives. C'est un institut de sondage qui s'occupe du recrutement de ce "public actif" pour assurer une représentativité correcte de l'electorat. L'émission s'intitule "face aux belges". Je sais que les lecteurs de ce blog sont interessés par le débat... Si l'expérience vous tente, renseignements ici.

Duels en série


Le Soir et la RTBF publient ce lundi à 40 jours des élections un intéressant sondage qui bénéficie de l'expertise du Cevipol de l’ULB. Profitons de cette photographie pour dresser un état des lieux et entrevoir ce que nous risquons de vivre dans les prochaines semaines. Si l’on en croit cette étude (à priori les grandes tendances ne sont pas très éloignées de celle des dernières livraisons du baromètre RTL-La Libre Belgique) PS et MR sont donc en recul coté francophone, tout bénéfices pour le CDH et Ecolo, tandis que le CD&V cartonne autant que le VLD s’écrase coté flamand. Le 10 juin au soir il y aura des formations qui affirmeront avoir « gagné », d’autres qui emploieront le terme « consolidé », et certaines qui auront reçu la « confiance de l’électeur ». Comprendre la campagne exige d’aller un peu plus profond dans les enjeux. Comme disent les sportifs il ya des « matchs dans le match ». Je vous propose d’en identifier quelques uns.

Le leadership francophone : PS et MR seraient donc en recul par rapport aux élections de 2003. Comme ce recul est également présent coté flamand on peut en conclure que les jours de la violette sont comptés. PS et MR se sont rendu comptes que s’ils reculent tous les deux et qu'il faut bien faire une (petite) place au gagnant seul l’un des deux pourra se maintenir au gouvernement. Dans cette perspective la place de première formation francophone reste un atout de taille, et perdre moins que son concurrent direct un argument supplémentaire. PS et MR sont donc en concurrence pour rester au pouvoir, avec pour l’instant un avantage chez les rouges, ce qui explique sans doute la stratégie des bleus : pour être sûr de rester dans la coalition, mieux vaut viser la première place, quitte à passer pour agressif et prendre le risque de tout perdre.

La deuxième place : si le PS conserve la première marche du podium, MR et CDH se disputent la deuxième place. Le MR a là une longueur d’avance. Mais le parti de Joëlle Milquet bénéficie d’un mouvement positif constant depuis plusieurs scrutins. Les centristes savent qu’à défaut d’être devant le MR, en enregistrant une nouvelle progression ils seront idéalement placés pour revenir au pouvoir. Le slogan "c'est l'heure" placardé lors du dernier congrès traduit même une certaine impatience. Tous les amateurs de football politique le savent : c’est au centre que la plupart des rencontres se jouent, et c’est donc là que la bataille est la plus âpre. On peut y ajouter un antagonisme personnel réel : Joëlle Milquet et Didier Reynders on toujours du mal à se parler.

Le gagnant des gagnants : CDH et Ecolo sont les partis en forme du moment. Etre le plus en forme des deux se joue sur deux critères : le plus fort score et la plus forte progression. L’avantage est pour l’instant au CDH mais les écolos savent qu’ils surfent sur un thème porteur (le climat). Les deux formations se disputent en outre un terrain fertile : l’éthique en politique.

Le match de la gauche : Ecolo depuis plusieurs mois affiche l’ambition de passer la barre des 10 pourcents. En privé certains de ses responsables mettent même la barre bien plus haut. Certes le parti vert a pris en 2003 une raclée monumentale, faire mieux est de l’ordre du possible, même sans se forcer. Mais pour faire mieux que mieux les écologistes devront prendre des voix au PS. La phrase de Jean Michel Javaux « le PS n’est pas le gardien de la gauche » prononcée à Mons doit être perçue par les socialistes plus comme un avertissement que comme une provocation.

Ajoutez le match Leterme-Verhofstadt au nord (avec avantage au premier pour l’instant). La liste n’est pas exhaustive, mais je crois qu’elle permet déjà d’y voir un peu plus clair.

28 avril 2007

Le 10 juin se joue sur le net

Osons un pronostic : la campagne des législatives 2007 sera marquée par l’utilisation massive d’Internet et une partie importante du débat se jouera sur le web. Certes le net fût déjà utilisé dans le passé, lors des communales de l’an dernier par exemple, mais l’on sent bien ces temps-ci un frémissement de la net politique belge. L’outil s’y prête bien entendu : léger et facile à mettre ne place (on écrirait presque à la porté du premier candidat venu), d’un coût modique (pas besoin de grever votre budget des dépenses électorales) interactif (si l’on s’en sait s’en servir) et ciblé (il est plus commode de trouver des citoyens réceptifs sur la toile que par l’intermédiaire des journaux télévisés). Il présente également l’immense avantage d’être direct (plus besoin de s’encombrer de ces intermédiaires pointilleux que sont les journalistes). Observez déjà : Elio Di Rupo poursuit son blog (ce n’(était pas un simple effet d’annonce), et la MRTV s’installe. Si vous surfez sur le blog du président du PS c’est la rubrique « réponses » (en haut à droite dans le "coin visiteurs") qui mérite le plus d’attention : on y voit Elio répondre face caméra aux questions des blogueurs. Une première. Toujours coté blogs, suivez Rudy Demotte (qui commente régulièrement l’actualité), Isabelle Durant et Hervé Jamar (dont le site très complet est une mine). Enfin n’oubliez pas Alain Destexhe : après l’avoir mis en sommeil pendant les élections communales le sénateur MR a réactivé un blog qui est probablement l’un des plus interactifs de ceux mis en place par le personnel politique. Pour moi, Destexhe (pour le débat) et Di Rupo (pour la maîtrise technique) sont incontestablement ceux qui utilisent le mieux internet aujourd’hui. Et je crois que ce n’est qu’un début (je prends le pari que d’autres blogs s’ouvriront dans les prochaines semaines).
Le débat sur internet est plus vif, plus partisan, contradictoire et complet que sur aucun autre média (tv comprise) : suivez les ramifications de site en site, vous aurez à la fois les infos et le spectacle. Observez enfin l’essor des « blogs citoyens ». La Belgique s’apprête à vivre dans les deux mois qui viennent le phénomène observé et souligné en France. Soulignons encore que 400 000 nouveaux électeurs voteront la première fois le 10 juin : des jeunes, qui surfent sur internet. Avec un rappel à l’ordre : être le plus présent dans la blogosphère ne vous assure pas de gagner les élections.

27 avril 2007

Fallait-il faire le "débat national" ?


Il y a bien sur ce couac technique pour lequel la chaîne a du s’excuser auprès des téléspectateurs avant de programmer une nouvelle diffusion sous titrée (si j’ai bien compris une opération sur le fichier son a endommagé les paramètres de mixage qui n’ont donc pas été transmis correctement vers notre site de diffusion à Luxembourg). Il faut y ajouter désormais le courroux du mouvement réformateur (vous pouvez lire ici le point de vue d’Hervé Hasquin) qui menace de déposer plainte devant le conseil supérieur de l’audiovisuel. Le but de ce blog n’est pas de polémiquer avec le président du MR : ses commentaires relèvent du débat politique je ne porterai pas de jugements (tout au plus soulignera-t-on que la dénonciation par les partis politiques d’un éventuel parti pris des médias est un grand classique des campagnes électorales et que François Bayrou, pour prendre un exemple étranger, a su en tirer un très bon profit). Pour éclairer les lecteurs de ce billet je voudrai néanmoins apporter quelques précisions sur le partage du temps d’antenne.


La couverture de la campagne électorale se divise en deux périodes : une période de prudence, au cours de laquelle nous respectons les équilibres de l’assemblée sortante, et une période de campagne à proprement parler où nous nous efforçons d’arriver à une égalité de traitement entres les formations démocratiques.
Le « débat national » intervient donc dans la première période dite de « prudence » (la période de campagne débute 40 jours avant l’élection, donc, pour ces législatives 2007, le premier mai). Durant cette période pas d’égalité de traitement entre les formations politique mais un équilibre correspondant au rapport de force des élections de 2003. Dans cette période il faut comptabiliser le débat national ET le grand défi de Louis Michel. Le temps de parole PS/MR ne semble pas, vu de mon bureau, si déséquilibrée.

A la question "fallait-il faire le débat national ?", la réponse est forcément oui.

20 avril 2007

Parenthèse française

Je serai ce week end en France pour la couverture du premier tour de l'élection présidentielle. Ce blog sera en sommeil trois ou quatre jours. Rendez-vous sur RTL TVI dimanche à 19 heures, et sur "Rue de la loi" à partir de mardi.

Frictions de fin de législature


Le dernier devoir d’une majorité est traditionnellement de boucler la leste des articles à réviser. C’est ce qu’impose l’article 195 de la constitution : ouvrir sous une législature, ce que l’on pourra changer sous la suivante, par un vote à la majorité des deux tiers. En 2003 il avait été décidé d’ouvrir à réviser cet article 195. Idée : simplifier la procédure pour pouvoir éviter les blocages institutionnels et changer plus facilement la constitution. Inutile de vous faire un dessin : l’article 195 est un verrou qui protège les francophones. En 2003 l’idée de toucher à cet article 195 avait déjà divisé les sénateurs, il n’y avait eu qu’une voix de différence. Il y a deux semaines les partis de la majorité (tous les présidents réunis autour du premier ministre) avaient pourtant convenu de reconduire la liste des articles ouverts à révision, article 195 inclus.
C’était sans compter sur les caractères forts de Jean Marie Happart et Anne Marie Lizin. Le groupe PS depuis hier fait donc entendre sa différence au sénat. A tel point que le MR a à son tour ruer dans les brancards : du genre « si le PS fait savoir qu’il a des états d’âme alors nous aussi, pas question d’être les seuls à respecter la consigne de vote ». Ce vendredi Didier Reynders et Christine Defraigne (chef de groupe au sénat) se sont donc retrouvés face à Philippe Moureaux et Frédéric Delcor (chef de cabinet d’Elio Di rupo) à la chancellerie du premier ministre. Guy Verhofstadt et Rennaat Landuyt (SPA) en position d’arbitres n’ont pas pu dénouer la crise. En commission Jean Marie Happart a donc voté contre l’ouverture à révision du 195, Anne Marie Lizin, puis le groupe MR se sont abstenus. En soi ce n’est pas une catastrophe. Le vote est resté positif (6 voix « pour », 4 « contre », et 4 abstentions) et à la chambre déjà Olivier Maingain s’était abstenu. Sur la forme en revanche cela indique une certaine instabilité de la coalition violette. Guy Verhofstadt, intervenu personnellement à deux reprises n’a plus les moyens d’imposer une ligne de conduite à l’ensemble des sénateurs de la majorité. Le fait que l’une des « rebelles » soit tête de liste au sénat ne simplifie pas les choses. On peut donc s’interroger sur la sincérité de l’accord passé entre partenaires de la majorité. Soit Elio Di Rupo n’est mesure d’imposer un vote à tous les sénateurs socialistes, Anne Marie Lizin y compris. Soit il a décidé de laisser une marge de manœuvre à la présidente du sénat en pleine campagne électorale. Stratégie dangereuse. Si la semaine prochaine, lors du vote en séance plénière le 195 venait à être recalé (on en est pas encore là, mais cela fait désormais partie des scénarios possibles) l’hypothèse d’une reconduction de la coalition violette aurait pris un sacré coup.

19 avril 2007

Le CDH découvre la vidéo


Le centre démocrate humaniste était, du point de vue d'internet, très en retard sur les autres formations. Il vient de faire un premier pas pour se mettre à niveau en publiant deux vidéos sur son site. Il s'agit d'un reportage et d'un entretien consacrés à l'arrivée d' Anne Delvaux. Le CDH annonce d'ailleurs que son site changera d'aspect dans les jours qui viennent. Deux personnes viennent d'être recrutées pour l'alimenter en vidéos. Il était temps : le retard des équipes de la rue des deux églises était tel que le danger de "net-ringardisation" était réel.
Joêlle Milquet devrait également lancer prochainement un site de campagne perso (celui des communales vient d'être désactivé).

18 avril 2007

Une campagne en panne de projets

C’est un exercice auquel nous devrions nous astreindre plus souvent. Quels sont aujourd’hui les thèmes de campagne dominants ? Autour de quelle question le débat se focalise-t-il ? L’interrogation concerne aussi bien les hommes politiques que les journalistes politiques, et au final intéresse tous les citoyens.
Depuis plusieurs mois je vois pour ma part quatre thèmes dominants.

1) L’enjeu climatique

En France cette thématique portée par Nicolas Hulot a fait l’effet d’un feu de paille : montée très haut avec le pacte écologique elle a perdu du terrain ensuite. Chez nous la question du réchauffement climatique reste un thème important, relancé par la réunion du GIEC à Bruxelles. On peut même écrire que cette thématique a « structuré » la première partie de la campagne, permettant à chaque formation d’avancer un programme et un positionnement spécifique.

2) Le débat institutionnel et communautaire

C’est une question plus permanente et plus délicate pour les partis politiques. Permanente parce que le débat communautaire est une réalité et que les négociations gouvernementales de l’après élection tourneront autour de cette question. Délicate puisque la tactique impose de respecter un « front francophone ». Le CDH s’est toutefois démarqué en évoquant un « stop institutionnel », cependant peu réalisable en pratique. Ce débat communautaire est l’occasion de muscler les discours des ténors. Ce débat avantage les deux plus grands leaders francophones : Didier Reynders peut se prévaloir de la présence à ses coté du FDF, la formation politique la plus présente sur cette question, tandis qu’Elio Di Rupo, fort de son statut de ministre président wallon et fréquemment pris à parti par la presse flamande en tant que président du PS, se pose en « rempart » des francophones.

3) La bonne gouvernance et les affaires

Le thème est prégnant depuis les affaires carolorégiennes et a déjà fortement marqué les élections communales. Le parti socialiste est le plus en difficulté sur cette thématique. Soumis aux aléas de l’actualité et des enquêtes judiciaires ce thème est aussi celui qui peut le plus alimenter une défiance générale vis à vis des partis politiques traditionnels.

4) Les alliances possibles

Ces questions occupent une bonne partie des interviews politiques. Si le discours officiel indique souvent que les « électeurs choisissent » et qu’il est prématuré de répondre à cette question, la thématique est en réalité abordée presque en permanence tout au long de la campagne. Les récents propos de Serge Kubla ou ces déclarations de Didier Reynders au journal Métro indiquent que le MR en fait un thème central de cette seconde partie de campagne. Cette thématique produit, pour l'instant l'effet suivant : PS et CDh d'un coté, MR-écolo de l'autre.


Au final on constate que des questions centrales comme l’emploi, l’économie, la dette, la sécurité ou la politique étrangère ne sont pas aujourd’hui des thèmes dominants de cette campagne électorale. Ce relevé est évidemment très subjectif, et je n’ai pas les moyens d’être plus précis (sans doute un travail plus scientifique est-il mené dans l’une ou l’autre université). Il sera intéressant de voir si les congrès de parti et les meetings programmés à partir de la fin de la semaine modifient cette « cartographie thématique ».

Un appel à l'incivisme

C’est un débat en commission de l’intérieur du parlement flamand. Le ministre flamand de l’intérieur Marino Keulen répond aux parlementaires qui s’inquiètent des conditions d’organisation des prochaines élections dans l’arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvoorde. La tonalité est claire : l’arrondissement aurait dû être scindé (ce souhait a même été voté par le parlement régional), les bourgmestres qui menacent de ne pas organiser les élections n’ont donc pas tout à fait tort (ceux ci estime que les élections de 2007 seront inconstitutionelles). Seul le député francophone Christian Van Eycken adopte une position différente, estimant qu'en l'état du droit l'arrondissement existe bel et bien. Réponse du ministre : « les bourgmestres qui n’organisent pas les élections ne seront pas sanctionnés ». La formule est franche et affirmative. Certes, l’organisation des élections législatives est placée sous la responsabilité du gouvernement fédéral. Il reviendra donc au ministre Dewael de pallier aux bourgmestres récalcitrants en demandant au gouverneur du brabant de veiller au bon déroulement du scrutin. Mais depuis le début de l’année ce sont bien les régions qui sont compétentes en matière de sanction. « Cela revient à dire à un automobiliste qu’il peut rouler à 80 kilometres quand c’est limité à 50, et qu’on ne le sanctionnera pas » commentait mardi soir Christian Van Eycken. Dans un pays de droit il est en effet surprenant d’entendre un ministre de l’intérieur « couvrir » une autorité qui refuse d’appliquer la législation. A fortiori lorsqu’il s’agit d’un acte aussi fondamental que l’organisation d’une élection. En Belgique, plus précisement en Flandre, c’est possible.

17 avril 2007

Opel après VW


Pour le gouvernement fédéral c’est une belle tuile. La décision d’Opel de ne pas produire la nouvelle Astra sur le site d’Anvers devrait entrainer la perte de 1 400 emplois. Pour un gouvernement qui avait fait de la création de 200 000 emplois sa principale ambition et à quelques semaines des élections c’est une nouvelle qui tombe mal. J’avais signalé ici combien ce type de décisions était prévisible. De même peut-on envisager dès ce soir ce qui se passera dans les prochaines semaines à Anvers. Dans un communiqué le premier ministre annonce son intention de « négocier » avec la direction d’Opel. Comme il l’avait fait pour le site de VW Forest, le gouvernement fédéral s’apprête donc à quelques concessions supplémentaires en faveur du secteur de l’automobile (il n’est pas possible d’avantager une seule entreprise) pour faciliter le travail en équipe ou accorder des incitants fiscaux. Dans un contexte préélectoral Guy Verhofstadt et Yves Leterme auront sans doute à cœur de gérer eux même le dossier en « direct ». Attendez-vous à voir les dirigeants d’Opel venir à Bruxelles. De préférence un peu avant les élections…

Pourquoi la France nous passionne ?


Interrogé par l’Agence France Presse sur l’engouement du public belge vis à vis des élections présidentielles, je me dis que c’est l’occasion de partager quelques éléments de réflexion avec vous. Il est toujours délicat de décréter que le grand public se passionne pour un sujet. Depuis quelques semaines la presse, écrite ou audiovisuelle, multiplie les reportages, interviews et autres analyses sur la campagne électorale française. Partons du point de vue que les médias ne se trompent pas complètement, et que, connaissant leur public et à la manière d’un bon baromètre, ils nous indiquent un véritable intérêt de l’opinion belge pour la présidentielle française. Comment l’expliquer ?

- Le débat français est vécu chez nous comme un divertissement. Le citoyen belge, en position de spectateur et non pas d’électeur, peut à sa guise se passionner, commenter, critiquer une élection, qui a une dimension ludique à mille lieu du vote obligatoire. La démocratie française est une représentation théâtrale tandis que notre vie citoyenne est une corvée.

- Le débat français, avec son scrutin majoritaire à deux tours, favorise la bipolarisation (droite-gauche), les positionnements manichéens et les victoires franches (un camp perdant, l’autre gagnant) alors que notre système proportionnel et nos coalitions peuvent être vécus comme un compromis permanent, peu lisible et où le choix de l’électeur se dilue dans les négociations d’après scrutin.

- Le scrutin présidentiel est personnalisé à l’extrême et joue sur un lien direct et souvent émotionnel entre le candidat et la nation. En Belgique la campagne est plus ou moins collective. Le président français incarne tous les français. En Belgique ce lien symbolique est réservé à la famille royale : un homme politique est, au mieux, l’incarnation de sa communauté linguistique.

- Le président de la république concentre entre ses mains l’essentiel du pouvoir. Dans la France centralisatrice sa désignation organise la vie politique. En Belgique, si l’échelon fédéral reste central, la régionalisation de nombreuses compétences brouille la compréhension des enjeux.


Je vous invite à lire, des réflexions sur le même thème, mais avec la plume qui lui est propre, chez Prométhée.

16 avril 2007

Foire du livre

J’avais mentionné ici la sortie de la biographie de Didier Reynders par André Gilain. Le ministre des finances attirent visiblement auteurs et éditeurs, puisque mi-avril les éditions Aden publieront « Didier Reynders, l’homme qui parle à l’oreille des riches ». Autant André Gilain est catalogué à droite autant Marco Van Hees, auteur du second ouvrage, semble être un homme de gauche (ultra-gauche ?). Se présentant comme journaliste et fonctionnaire au ministère des finances ( !) l’auteur affirme dans son communiqué de presse que « Les holdings d’Albert Frère paient moins d’impôts que sa concierge (…). Reynders prétend qu’il a réduit la pression fiscale. Pour les nantis c’est clair. Pour le commun des contribuables, les chiffres sont loin d’en attester ». Bref l’ouvrage sera critique. Le ministre des finances y sera probablement décrit comme « le ministres des banquiers et des rupins » pour reprendre l’expression d’un socialiste bruxellois. Ceux qui n’ont pas aimé « la face cachée de l’iceberg » apprécieront peut être davantage ce récit là.

Des goûts et des couleurs


Pourquoi faut-il qu’Anne Delvaux porte un châle orange, André Flahaut une écharpe rouge, même quand la météo est clémente, et Serge Kubla une cravate bleue ? La réponse est simple : pour indiquer clairement quel est leur parti. Pas convaincu ? Jetez un œil sur le site "artistes en campagne". Vous constaterez que la couleur est bien un élément central de la communication politique. Le mérite de l’artiste Werner Moron, auteur du montage est bien de vous comprendre que Di rupo s'accorde au rouge, et que Reynders ne paraît pas naturel sur un fond qui n’est pas bleu…les mauvaises langues ajouteront que la démonstration est moins percutante pour le vert et l’orange.
Merci à Thierry Dupiereux pour le lien.

14 avril 2007

Le festival de Kanne

Désolé, même si le jeu de mot est facile je ne pouvais pas résister au plaisir d’un tel titre. Ce vendredi Elio Di Rupo et Yves Leterme étaient donc ensemble à Kanne (commune de Riemst, à une encablure de Bassenge) pour une action en hommage aux enfants disparus ou victimes de la violence. Ensemble, les deux ministres présidents ont participé à la plantation de deux arbres le long du canal Albert, l’un coté wallon, l’autre coté flamand. Pour renforcer l’aspect symbolique de la manifestation les organisateurs avaient mobilisé une vingtaine de jeunes enfants et la mère de Joe Van Holsbeek, assassiné gare centrale il y a un an, était également présente.
Voir ensemble le ministre président flamand et le ministre président wallon dans de telles circonstances pourrait passer pour un événement banal (n’est il normal que les deux grandes communautés du royaume se soucient de la sécurité des jeunes ?), mais c’est en réalité un rendez vous rare qui nous était proposé ici, surtout à quelques mois d’une élection cruciale. Il n’a échappé à personne qu’Elio di Rupo et Yves Leterme étaient deux candidats potentiels au poste de premier ministre. A Kanne, il était donc possible d’observer les comportements d’ Elio Di Rupo et Yves Leterme lorsqu’ils sont en présence l’un de l’autre. Edifiant. Si les deux hommes se sont bien salués (difficile de passer à côté, une vingtaine de journalistes étaient présents) c’était sans effusion excessive. Côte à côte, Di Rupo et Leterme se parlent mais cherchent du regard d’autres interlocuteurs. Quand Leterme entame une discussion avec un élu local, Di Rupo regarde ostensiblement ailleurs. Quand Elio répond à un journaliste, Yves en profite pour faire quelques pas de coté. Posant pour les photographes ils conservent quelques centimètres de distance, ou invitent Françoise Van Holsbeek à s mettre entre eux. Pour utiliser un vocabulaire de critique cinématographique le socialiste et le social chrétien donnent l’impression de deux acteurs contraints de partager la même affiche mais se contentant d’une prestation professionnelle minimale, peu à l’aise dans l’interprétation d’un scénario qu’ils n’ont pas écrit eux même. Répondant à l’une de mes questions Yves Leterme affirme pourtant que les deux ministres présidents se voient régulièrement. Deux minutes plus tard Elio Di Rupo refuse de le confirmer. C’est une évidence : si ces deux là veulent travailler ensemble demain, il vont devoir se voir beaucoup.

13 avril 2007

Le retour de Jacky


Il revient de loin. Jacky Morael, que j’ai rencontré aujourd’hui, porte les stigmates de quelques années difficiles. Victime d’une mauvaise chute, colonne vertébrale cassée, il se déplace désormais canne à la main. Marqué par les épreuves (il a perdu un enfant) et par un exil politique qu’il a plus subi que souhaité. En 1999 l’assemblée générale d’écolo n’avait pas souhaité qu’il devienne ministre. Il reconnaît aujourd’hui que l’épisode fût désagréable et que les « manœuvres » de quelques camarades de parti lui restent en travers de la gorge, bien présents dans sa mémoire. S’il est marqué physiquement, Jacky Morael conserve par contre une capacité d’analyse intacte et se dit toujours passionné par la chose politique (vous pouvez lire ici son interview au Vif). Son retour fût maintes fois annoncé et reporté. Cette fois-ci semble la bonne. La présence ce midi de Jean Michel Javaux à ses côtés avait d’ailleurs valeur d’un passage de témoin. 8 ans après son « retrait » Jacky Morael reçoit le soutien public du nouveau secrétaire fédéral. Et dans le même temps dit tout le bien qu’il pense de lui. Les deux hommes partagent des souffrances communes (la famille Javaux a également vécue la perte d’un enfant) et sans doute une même vision tactique (Ecolo doit se démarquer du PS). Bien sûr la présence de l’ancien patron des verts sur la liste du sénat répond à une motivation électorale : Morael pourrait séduire quelques dizaines de milliers d’électeurs. Mais si Jean Michel a rappelé Jacky c’est sans doute aussi pour l’aider à panser ses blessures, et faire savoir qu’entre les deux secrétaires fédéraux, il y a une sorte de filiation.

Imbroglio social à l'IEV

Que se passe-t-il exactement au centre d’étude du parti socialiste ? L’institut Emile Vandervelde est depuis deux jours au cœur d’une enquête de l’auditorat du travail. Descente d’un magistrat au siège du parti, avec journaliste opportunément prévenu : il s’agit d’un effet collatéral des affaires carolos. Les magistrats ont en effet pu découvrir que la députée Alisson De Clercq bénéficiait des services d’un collaborateur rémunéré par l’IEV. Elle n’était pas la seule : 19 élus au total auraient bénéficié de ce système (certaines sources avancent même le chiffre de 26 ou 27 élus). Pour les spécialistes en droit du travail c’est illégal. Une « mise à disposition » s’effectue dans des cadres précis avec des conventions ad hoc, ce qui n’était pas le cas ici. Coté PS on conteste : l’IEV comme les députés en question œuvre pour le parti, c’est donc la même entité qui payait les collaborateurs et bénéficiait de leur activité (on résume à grands traits, mais c’est l’argumentation défendue).
Sur le fond, ce n’est pas l’affaire du siècle. On peut reconnaître à Frédéric Delcor, patron de l’IEV et présenté souvent comme le bras droit d’Elio Di Rupo, une certaine franchise dans sa défense. Il n’y a pas eu de détournement d’argent public, juste un jeu d’écriture. Tout au plus les socialistes s’exposent-ils, si les faits devaient être poursuivis à quelques milliers d’euros d’amendes.
Su la forme c’est plus délicat. Que le parti socialiste prenne des libertés avec le droit du travail est étonnant. Que l’affaire surviennent à une encablure des élections peut être gênant : ce n’est plus la frégate carolo qui intéresse la justice du travail mais le navire amiral. S’intéresser à l’IEV c’est en effet toucher le cœur du pouvoir présidentiel. Dans un parti où les fédérations conservent une réelle autonomie le centre d’étude est au service du président. Les hommes qui le dirigent (Frédéric Delcor aujourd’hui ou André Flahaut hier) sont les véritables machinistes en chef du PS. Si l’affaire s’emballait, Elio di Rupo, qui avait affiché une certaine distance avec des socialistes carolorégiens dont les pratiques étaient présentées comme « archaïques », serait sans doute contrait de changer de posture.

PS (c’est le cas de le dire) : je constate l’arrivée de nouveau lecteurs qui découvrent « rue de la loi » par l’intermédiaire d’un lien sur le blog d’Elio Di Rupo. Je suis bien sûr honoré d’être référencé sur le blog du président du PS. Le libellé de la rubrique « blogs amis » mérite d’être nuancé. S’il peut y avoir entre un journaliste politique et un président de parti une estime intellectuelle et un respect réciproque, il ne saurait y avoir « d’amitié » au sens fort du terme. Les lignes ci dessus devraient vous convaincre de mon indépendance.

11 avril 2007

Le mercato


De retour en Belgique après quelques jours de repos à l’étranger, voici que je tombe en plein recrutement de « francophones connus »s pour les listes du 10 juin. Ainsi Anne Delvaux a-t-elle décidé de quitter le journalisme pour le sénat. La présentatrice de la RTBF a eu droit à un accueil grandiose, et en 2ième position est assurée de siéger dans la haute assemblée. Tant mieux pour elle, même si on peut quand même se demander quelles qualités une présentatrice de JT peut bien présenter pour obtenir si facilement un strapontin. Certes, être une jeune femme vous attire plus d’inimitiés que de soutiens dans un pareil cas. Anne Delvaux devra donc travailler beaucoup pour prouver à ses nouveaux collègues qu’elle est compétente et capable de faire avancer des dossiers de fond (et pas uniquement sur l’actualité internationale comme elle en annonce l’intention, puisque les débats communautaires et éthiques sont en l’occurrence des débats tout aussi majeurs au sénat). En attendant, elle aura du mal à passer, durant la campagne pour autre chose qu’une souriante affiche électorale en trois dimensions. Le CDH, où la présidente aime pousser la jeune génération, vient de s’offrir une personnalité de la société civile qui fait déjà figure de candidate « attrape-voix » dans la pure tradition des Marc Wilmots et Frédérique Ries. C’est que les partis politiques raffolent de ces « candidats surprises » qui permettent d’attirer le chaland au delà de la base électorale traditionnelle. Ce mercredi Ecolo annonce ainsi le soutien de Pino Carlino, ex-secrétaire national du syndicat CSC. Le PS avait de son coté il ya quelques semaines pu mettre en avant un ancien cheminot emblématique (José Damilot) et un transfuge écolo (Henri Simons).
Le MR semble, cette fois-ci, légèrement (et momentanément ?) en retrait. Si cela se confirmait il faudrait sans doute y voir la volonté de son président actuel de se démarquer d’une des marques de fabrique de son prédécesseur ( Louis Michel avait convaincu quelques grands formats comme Ries, Bodson et Wilmots ) . Il est vrai que faire élire un footballeur au sénat, par exemple, ne fût pas, une fois l’élection passée, une grande réussite.