29 août 2013

Lallemand et Van Den Broeck nouveau duo pour le rail belge

L'information n'est pas encore officielle mais plusieurs sources gouvernementales confirment ce midi qu'on approche d'un accord dans la saga des top manager. Pour rappel le gouvernement fédéral se déchire depuis de longs mois sur le casting des hauts dirigeants d'un grand nombre d'entreprises ou d'organismes dont le mandat est arrivé à échéance. Pas moins d'une centaine de mandats à renouveler dont des entreprises très emblématiques comme B-Post, Belgocontrol, la loterie nationale ou l'IBPT. Au sein de cette liste c'est surtout autour de la SNCB que les choses se sont crispées en juillet. Avec la réforme du rail on passe de 3 entreprises (Sncb, Infrabel et la Holding qui chapeaute les deux) à deux. Ajoutez un débat sur les rémunérations et les discussions ont trainé plus qu'en longueur. Le train des nominations ressemblait plus à une locomotive à vapeur qu'à un Eurostar. Selon toute vraisemblance et d'après les informations que j'ai peu recueillir Luc Lallemand serait donc reconduit à la tête d'Infrabel (le réseau) tandis que Michel Van Den Broeck prendrait la tête de la SNCB (le reste). Michel Van Den Broeck, actuel patron de Leaseplan après être passé par ABX est la surprise du casting. Il remplacerait donc Marc Descheemaeker qui irait lui s'occuper de B-logistics. Jeannie Haeck le patron de la holding actuelle se retrouverait à la tête de la loterie nationale. Bref ce n'est ni la reconduction pure et simple des patrons sortants, ni l'option tabula rasa, mais un mélange des deux. Théoriquement la décision aurait du formellement être prise vendredi midi par le conseil des ministres. Ce jeudi le scénario ne faisait pas l'unanimité coté flamand. Le conseil a été prudemment reporté à lundi.

26 août 2013

Charles Michel veut du fiscal et ne désavoue pas ses parlementaires

C'est la rentrée. Ce matin pour mon premier interview de la saison je recevais Charles Michel sur Bel RTL. Le président du mouvement réformateur y a défendu l'idée d'une nouvelle réforme fiscale. Baisser les impôts de 5 milliards permettrait de créer 100 000 emplois affirme le libéral. Et selon lui il ne serait pas nécessaire de compenser par de nouvelles économies (voir l'extrait ci-dessus).

 Plus loin dans l'interview j'ai également interrogé Charles Michel sur les sorties de Jacqueline Galant (voir article ci dessous) et d'Alain Destexhe (il a publié la semaine dernière une carte blanche dans la Libre Belgique s'interrogeant sur l'utilité du centre pour l'égalité des chances).
Le président du MR n'a pas désavoué les deux parlementaires :  bien entendu que ce que Jacqueline Galant dit c'est au nom du MR mais il faut prendre l'ensemble du message du MR ou encore c'est la liberté de Destexhe de s'interroger sur la manière dont le Centre pour l'Egalité des Chances utilise l'argent public. 

14 août 2013

Isabelle Durant annonce qu'elle ne veut que l'Europe


C'est la conséquence d'un billet publié ici même : Isabelle Durant annonce sur Twitter qu'elle n'envisagerait pas de se présenter à la chambre, quelques soient les circonstances. J'expliquais il y a deux jours dans un billet que vous trouverez ci-dessous que la député européenne écolo était en compétition avec Philippe Lamberts pour obtenir la tête de liste en mai prochain. Pour les deux candidats obtenir la pôle position est crucial : les Ecolo sont assurés de passer un deputé, mais parier sur le second est plus qu'hasardeux.
J'expliquais que le/la recalé(e) pourrait toujours se présenter au poll suivant, celui qui désignerait la tête de liste pour les élections législatives. Sur Twitter Isabelle Durant à donc infirmé l'hypothèse : 'choix par défaut : non' précise-t-elle dans un tweet repris par l'agence Belga et le site de la Libre Belgique  (le Soir reprend l'info en ne parlant que de Twitter). Elle fait ainsi part de son engagement et de son désir d'Europe. Elle a quelques atouts à faire valoir, sa vice-présidence du parlement et sa proximité avec des poids l'ours comme Daniel Cohn-Bendit n'étant pas les moindres. Cette sortie sur Twitter indique donc que l'Europe ne serait pas le premier choix, mais le seul choix pour celle qui fut autrefois secrétaire fédérale puis vice-première ministre. 
Je maintiens cependant que si la confection des listes à été prévue dans cet ordre là par la co-présidence d'Ecolo c'est bien avec cette idée là : voyons d'abord comment tourne la liste au parlement européen pour voir qui sera ensuite candidat à la chambre. Et ajoutons que les écologistes seraient bien sots de se passer de Durant ou de Lamberts puisque l'un comme l'autre ont démontré de réelles qualités de parlementaires. 



Notes de lecture : les outils du journaliste

J'ai un peu de retard. Mais je m'étais dit qu'en relançant ce blog je signalerai de temps à autre des ouvrages que je trouve significatifs et en rapport avec la matière traitée ici. Je vous recommande donc 'Du pigeon voyageur à Twitter' petit ouvrage collectif, dans la collection'Liberté, j'écris ton nom'. Les trois auteures (Vinciane Colson, Juliette De Maeyer et Florence Le Cam, toutes enseignantes à l'ULB) proposent un petit parcours parmi les outils techniques du journalisme.
Cela se lit rapidement, 90 pages, le style est factuel et agréable, et le contenu reste très concret : du pigeon voyageur aux ordinateurs, du calepin aux ciseaux, quels sont les outils qui comptent dans ma profession ?
Retenons un point : le copié-collé a toujours existé. Aujourd'hui sur les sites d'info on recopie de la dépêche (on la 'reformate' c'est à dire qu'on raccourci, qu'on ajoute un titre, une photo et un éventuel lien hypertexte) mais est-ce  vraiment éloigné du battonage d'antan quand on demandait au journaliste stagiaire de faire la colonne des brèves ? C'est le principal rappel de cet ouvrage (outre que les journalistes ont toujours été peu payés).
Bref, le journalisme évolue mais ne change pas fondamentalement. Les journaux ont toujours tenté de concilier deux logiques : celle de fournir un contenu original et à forte valeur ajoutée qui les distingue de la concurrence, et celle d'être exhaustif en reproduisant un maximum d'informations même si on les trouve ailleurs. Le journalisme c'est à la fois de la création et de la vente, de la consience civique et du marketing. J'ajouterai, mais ce n'est pas dans le livre, que les titres qui négligent l'aspect créatif finissent toujours pas disparaître, absorbés ou depassés par plus exhaustif et plus rapide qu'eux... 

12 août 2013

La bataille de 2014 se joue à la chambre

Le quotidien Le Soir publié ce samedi un intéressant casting des têtes de liste pour les élections de l'an prochain. Pour rappel en mai nous voterons à la fois pour les législatives (la chambre) les régionales (parlement wallon, bruxellois ou flamand suivant votre lieu de résidence) et européennes (parlement européen). Législateur et réforme de l'Etat ont voulu qu'il n'y ait plus d'élection au Sénat et qu'un candidat ne puisse se présenter que dans une seule assemblée.
D'après Le Soir Elio DI Rupo sera donc candidat pour la chambre, dans le Hainaut alors que Rudy Demotte et Paul Magnette se présenteraient au parlement wallon. Les bruxellois verront s'affronter Laurette Onkelinx, Joëlle Milquet, Didier Reynders et Olivier Maingain aux législatives (3 vice-premiers et un président, belle affiche à laquelle mes confrères ajoutent  Zakia Kattabi, mais j'aurai moi  qu'il est plus prudent d'attendre qu'Ecolo ne désigne sa tete de liste européenne- elle se joue entre deux autres bruxellois Isabelle Durant et Philippe Lamberts, rien n'empêcherait le perdant de viser le parlement fédéral à défaut des étoiles Européennes). Que Jacqueline Galant dont je vous parlais il y a peu irait au parlement wallon. Que Marie Arena, Jean-Pascal Labille, Louis Michel ou Anne Delvaux sont cités pour l'Europe. 
Fort bien. Le journaliste qui signe l'article, David Coppi, est l'un de ceux qui connaît le mieux notre personnel politique. La distribution, qu'il presente avec la prudence nécessaire s'appuie sur des confidences receuillies à bonne source et des  infos vérifiées, le pronostic est donc hautement plausible et se vérifiera probablement en grande partie.
Mais n'allons pas trop vite. À 9 mois des élections tout peut encore bouger. Dans plusieurs circonscriptions les candidats sont encore au coude à coude, ce qui n'est pas étranger à nombre de sorties dans la presse ces dernières semaines. Ce n'est qu'en janvier que les troupes seront en ordre de marche, peut être même après. 
À la copie de David Coppi ont serait tenté d'apporter non pas un bémol mais un éclairage supplémentaire. Celui des objectifs prioritaires. Puisque plusieurs scrutin se déroulent simultanément chaque formation devra arrêter une hiérarchie. Ainsi pour le PS c'est probablement la bataille des législatives qui sera considérée comme celle à ne surtout pas perdre. Retrouver 26 députés semble difficile pour le PS, mais il faudrait  limiter la casse et rester première formation francophone à la chambre. Deux arrondissements, parce qu'ils pèsent plus lourds en terme de population et donc en terme d'élus   sont cruciaux dans cette stratégie : Liège et le Hainaut. Raison pour laquelle Elio Di Rupo sera candidat à la chambre et non à l'Europe. Poussons la logique un peu plus loin : si la chambre est si importante, que l'avenir du pays et la place de premier ministre se jouent là, pourquoi ne pas jeter toutes ses forces dans cette bataille? Imaginez : derrière Elio Di Rupo, Rudy Demotte et/ou Paul Magnette. Les 3 locomotives électorales hennuyeres ensemble dans une belle image d'unité.... Certains socialistes n'écartaient pas il y'a quelques semaines l'idée d'une telle dream-team législative. Toujours avec la même logique Jean-Pascal Labille pourrait plus efficacement tester son capital électoral à la chambre qu'à l'Europe, reléguée dans la seconde division électorale. C'est là que je voulais en venir : pour le PS le casting des régionales est probablement secondaire et je ne lui accorderai pas la même importance que mon collègue.   La réflexion est identique pour Ecolo : Jean-Marc Nollet sera plus vraisemblablement candidat à la chambre qu'au parlement wallon,  ce qui lui permettra en outre d'être à nouveau chef de groupe si jamais les verts devaient quitter le pouvoir régional. Au CDH Benoît Lutgen doit  s'interroger sur sa capacité à décrocher un second siège grâce à son score personnel, plutôt la chambre, plutôt la région ?  Au MR Charles Michel à déjà tranché en faveur de la chambre. 
Reste un contre-exemple : le FDF n'a plus beaucoup d'illusion sur son poids fédéral : il passera de 3 à 2, voir 1 deputé. Il peut en revanche espérer peser sur la parlement bruxellois, et pourquoi pas intégrer une nouvelle majorité régionale. Raison pour laquelle Bernard Clerfayt sera plus utile derrière Didier Gosuin que derrière qu'Olivier Maingain. Mais pour tous les autres partis les faits sont là : c'est le rapport de force au parlement fédéral qui sera déterminant. C'est donc aux législatives qu'on fera rouler ses plus grosses locomotives. 

08 août 2013

La puissance des réseaux sociaux

Avoir créé un blog en 2006 et y revenir 7 ans plus tard est un exercice riche d'enseignement. À mes débuts sur la toile, l'idée était de créer un blog où je pourrais écrire librement sur la politique, sans contrainte de format et en me permettant de quitter la simple narration des faits pour m'autoriser un peu d'analyse. Je soignais ma frustration de reporter politique dans une grande chaîne de TV, comdamné volontairement à respecter la durée de 1 minute 30 (je trichais souvent) et toujours soucieux de m'adresser au plus grand nombre, transcendant les catégories sociales, les opinions et même le niveau d'étude. Un reporter TV, même s'il est chargé de la complexe politique belge, doit faire court et simple. Pédagogique. Efficace et attrayant. Je l'ai fait avec beaucoup de plaisir et de conviction, et maintenant j'essaye de transmettre passion et savoir faire à plus jeunes que moi.
Sur ce blog, donc je me faisais plaisir. Quelques dizaines de lecteurs au début, quelques centaines ensuite. Suffisamment pour soigner mon péché d'orgueil. 

En 2009 l'exercice changea de dimension.  Mon activité sur le net fut incorporée à mon travail rémunéré. Le blog, reprenant les billets que je rédigeais pour la radio Bel RTL, prit le nom de carnet politique et fut intégré au site RTLinfo.be. L'audience changea de nature. Suivant la qualité du billet, le reste de l'actualité et sa mise en avant sur la homepage du site, on parlait de plusieurs milliers de lecteurs. Il m'est arrivé d'en compter 40 000 lorsque l'indexation sur les moteurs de recherche était favorable. 

J'entre aujourd'hui dans une troisième phase. Je pensais en relancant cette vieille adresse retrouver les sensations de pionnier du net d'il y a 7 ans. Premiere surprise, alors qu'à l'epoque il fallait ajouter un hypothetique compteur en jonglant avec le langage  html qui m'est aussi familier que l'elevage des iguanodons, j'ai découvert que les plateforme de blog comprennent désormais automatiquement un compteur qui semble fiable. N'empêche.  Ne plus avoir la machine RTL derrière mes textes ne me permettrait que quelques dizaines de clics, au moins au debut pensai-je. J'ai sous-estimé l'impact. Le billet sur le 'tweetgate' à déjà réuni 2800 lecteurs. Celui sur l'interview de Jacqueline Galant au Soir a dépassé les 6 000. En quelques jours et en plein mois d'août. Comparé à de grands sites d'info c'est peu sans doute, mais  à l'échelle  des tirages de la presse belge, c'est déjà appréciable. 

Je prends avec cette expérience conscience de la force des réseaux sociaux. Un tiers des lecteurs de ces deux billets arrivent à ce blog par Facebook. Un quart par Twitter. Le blogueur de 2006 n'avait pas de telles caisses de résonance à sa disposition. Ce sont vos partages et vos retweets qui ont fait le succès de ces deux billets. Soyez en remerciés. 

Ce qui était une théorie en 2006 et devenu une réalité en 2013. On peut très bien aujourd'hui diffuser de l'information, des idées, des opinions (mais aussi de l'art, de la création, etc) avec peu de moyens. Si vous proposez un contenu original qui touche les internautes la viralité  peut conduire au succès. Ca n'est pas forcement remunerateur, mais là n'est pas la question. Qu'un billet puisse trouver des lecteurs sans investir dans une lourde intendance est le constat qui m'occupe aujourd'hui. Cela tranche avec l'idee que sur le net toutes les infos se ressemblent pusiqu'elles viendraient toutes d'une depeche d'agence automatiquement mise en ligne. Et c'est une bonne nouvelle pour le journalisme.  


06 août 2013

Jacqueline et le marronnier

La politique et le journalisme ont au moins un point commun : celui de cultiver les marronniers. En journalisme l’expression renvoie aux sujets qui reviennent chaque année sous la plume et dans l’œil des caméras lorsque l’actualité se tarit et que l’imagination se fait rare. Le coût de la rentrée des classes, le bilan des soldes, le hit-parade des destinations de vacances sans compter les prix de l’immobilier ou l’influence de la  franc-maçonnerie sont des marronniers que l’on retrouve chaque année. Le lecteur n’apprendra rien en lisant l’article, mais ça fait passer le temps.

En politique les élus se positionnent périodiquement sur leurs marronniers à eux : la fiscalité des entreprises, les énergies vertes, le niveau scolaire. C’est leur job. Comme pour les journalistes, les plus inventifs tentent de réinventer le marronnier et d’avancer dans le débat,  alors que les plus besogneux sortiront les mêmes arguments d’une année sur  l’autre. Il est en Belgique (comme en France et sans doute dans toute l’Europe occidentale)  un marronnier politique  qui fleurit plus souvent que les autres : celui de l’intégration.  Ce n’est pas que les tenants ou les aboutissants du débat évolueraient constamment et nous obligeraient à revoir régulièrement nos jugements, mais visiblement la question taraude l’élu et serait de nature à marquer des points auprès de l’électeur.

Ce mardi matin c’est Jacqueline Galant,http://www.jacquelinegalant.be/ députée bourgmestre MR de Jurbise qui s’y colle. Dans un entretien au journal Le Soir elle déclare donc que « l’intégration des populations étrangères est problématique. C’est un échec. » Ce n’est pas la première fois que les termes « intégration » et « échec » sont ainsi associés, il faut reconnaitre que les libéraux reviennent régulièrement sur la question.  Avant de me faire accuser d’être un apôtre du politiquement correct, je reconnais que la question est une vraie problématique. Mais tant qu’à poser cette question essayons de déshabiller le marronnier pour aller voir ce qu’il y a derrière.  La politique c’est l’art d’employer des mots pour faire passer ses idées. Montre-moi ton vocabulaire je te dirais qui tu es.

Jacqueline Galant emploie l’expression de « populations étrangères » et plus loin dans l’article de « communautés étrangères » nous précisant que « souvent ils connaissent bien leurs droits mais ils oublient qu’ils ont aussi des devoirs ».  Qui sont ces populations ou communautés étrangères ? Jacqueline Galant et le journaliste qui l’interroge ne définissent pas ces deux concepts. Mais un peu plus loin dans l’interview la députée explique « quand je vois certains quartiers de Bruxelles que je traverse pour me rendre au parlement il y-a des zones de non-droit où les communautés étrangères ont pris le dessus sur la communauté belge » ou encore « quand je me rends au parlement en passant par Anderlecht  je ne vois plus aucune enseigne en Français ce n’est pas normal » et de conclure lorsqu’on lui demande sur quoi portera sa prochaine campagne électorale «  asile-immigration et sécurité. Les gens en ont ras-le bol ».
 

Donc, si je comprends bien les populations étrangères dont Jacqueline Galant nous parle  (et qui auront le grand honneur de lui servir d’ossature pour sa campagne électorale) sont celles qui habitent dans les quartiers est de Bruxelles. Je vais décevoir l’élue : la plupart des habitants qu’elle croise lorsqu’elle traverse ces communes à l’arrière de sa berline parlementaire sont des belges. Des jeunes gens ou des jeunes filles qui sont nés ici, dont les familles sont installées parfois depuis 2 ou 3 générations et qui ont exactement les mêmes droits que le bon habitant de Jurbise. Il faut que les mots aient un sens : être belge c’est posséder une nationalité (l’auteur de ces lignes ne l’a pas). Pas un patronyme fleurant bon la Flandre ou la Wallonie. Pas un couleur de peau, blanche, ou une couleur de cheveu, lisses de préférence. Pas une manière de s’habiller. Pas des habitudes alimentaires. Pas croire en un dieu plutôt qu’en un autre. Non. Etre belge c’est avoir le droit de se revendiquer de ce royaume parce qu’on en est l’un de ses 11 millions de citoyens. On peut s’appeler Mohammed et faire le pèlerinage de la Mecque et être belge, et on espère bien que Jacqueline Galant est d’accord avec cette définition.

Autre concept utilisé dans cette interview celui d’intégration. Là non-plus pas de définition. Il faut comprendre qu’afficher le nom de son magasin dans une autre langue que la Français serait faire preuve d’une mauvaise intégration. On notera que c’est exactement le même argument que celui qui est employé en périphérie Bruxelloise pour obliger les commerçants à supprimer le français pour ne tolérer que le néerlandais. Où commence l’intégration ? Quelle est la différence avec l’assimilation ? Faut-il préférer la fricadelle sauce andalouse au tajine poulet-citron pour être bien intégré ? Porter un costume avec une cravate ? Se prénommer Jacqueline plutôt que Fatima ?

En employant  les mots communauté étrangère ou intégration Jacqueline Galant renvoie en réalité vers d’autres concepts qu’elle n’ose pas nommer parce qu’elle sent bien qu’ils dévoilent une pensée xénophobe. Ce dont nous parle à demi-mot Jacqueline Galant c’est d’islam et de communauté marocaine. Le message est à peine codé. Et oui, il est ouvertement raciste.

Le débat pourrait bien être posé pourtant. Il faut pour cela admettre que ces jeunes gens ont plus besoin de mains tendues que de rejet.  Qu’il y a là des questions sociales, d’emploi, d’urbanisme, d'organisation du culte et que ce ne sont pas des questions simples à gérer. Que si des ghettos se créent c’est que nous les avons laissés se créer, c’est rarement la volonté de leurs habitants de s’y retrouver. Que cette immigration sert notre économie.

Mais quittons les concepts abstraits et redescendons au niveau du bon sens populaire cher à Jacqueline Galant.  Si vous êtes nés quelque part, ce n’est assurément pas de votre faute.  Vous pouvez en vouloir à vos parents, mais vous n’y pouvez rien.  Votre prénom et votre nom ? Toujours pas de votre faute.  Votre couleur de peau ? Pareil. Et pourtant si votre couleur de peau, votre patronyme, votre religion sont autant d’obstacles pour trouver un boulot, louer un appartement ou passer un contrôle de police, vous aurez des raisons de crier à l’injustice. Le racisme et l’inégalité des chances sont une réalité. Si en plus une députée qui traverse votre quartier  vous qualifie de « communauté étrangère », vous, ça ne commencerait pas à vous agacer ? Moi, je crois bien que j’aurai envie d’abattre le marronnier. Histoire de voir chuter ceux qui sont perchés dessus.

03 août 2013

Le Tweet, la presse et l'électorat

J’aimais bien les tweets de Gaëlle S. Bien sûr je savais qui se cachait derrière le pseudo (Gaëlle  était la collaboratrice de Daniel Ducarme la première fois que je l’ai rencontrée et travaillait depuis pour le Mouvement Réformateur). Avouons qu’ils étaient incisifs, souvent drôles, parfois méchants et de temps en temps simplistes, caricaturaux ou inutilement provocants. Sans doute avais-je un avantage sur le lecteur profane : derrière le pseudo je  savais  que ce profil twitter cachait une collaboratrice du MR. J’appliquais donc ce filtre à des messages qui n’étaient pas ceux d’un citoyen innocent, loin de là. Mais bon, j’aimais bien. Elle avait du style, un détachement cynique et un sens de l’humour qui me convenaient.

Donc Gaëlle S. a perdu son boulot à cause d’un tweet de mauvais goût. Si vous avez raté l’épisode faites une petite recherche google, c’était fin juillet. Un message où l’on traite les pèlerins de « couillons » au lendemain d’une catastrophe ferroviaire cela ne se fait pas. Article de presse, reportages, discussions sans fin sur les forum, Gaëlle Smet a fait l’objet d’un « entretien sévère » puis a finalement été remerciée par son employeur.


L’incident est clos, chacun le juge en fonction de sa sensibilité religieuse, de son émotion face à la catastrophe, de  son humour ou de sa légèreté, inutile d’y revenir sur le fond, mais tirons-en 3 leçons. 

1) Twitter n’a tué personne

Contrairement aux apparences ce n’est pas son message de 140 caractères  qui fut fatal à Gaëlle. Avouons d’ailleurs qu’elle en a écrit de bien pires. Ce qui provoque sa chute c’est bien un article de la Libre Belgique, suivi d’un reportage au 19 heures de RTL TVI avant que l’affaire ne finisse en France, avec BFM TV et ne gagne finalement le monde entier.  Un article dans un quotidien de référence cela donne du crédit à toute polémique. Le passage dans un journal télévisé lui confère un caractère quasi-universel, puisqu’il est vu par 700 000 personnes.  Avouons que sur Twitter nous ne sommes que quelques centaines de passionnés en Belgique francophone. Au pire quelques milliers de personnes auraient pu voir ce fameux tweet. Entre twittos on se chamaille, se chatouille, se poignarde,  on s’excommunie, ça cogne sévère, mais cela n’est qu’une arène virtuelle et relativement confidentielle. 

Un passage dans un JT c’est autre chose. Sans lui  la petite phrase passait inaperçue. Exposée aux yeux du monde cela devenait une faute majeure dont les conséquences étaient difficiles à maitriser. Des propos explosifs sur Twitter font autant de bruit que 3 gouttes d’acide dans une éprouvette. Ils ne deviennent une  véritable déflagration quand ils sont relayés par les médias traditionnels.  

Sur le strict plan de la communication  la direction du MR se devait donc d’agir : l’affaire risquait de devenir un argument politique susceptible de ressortir en campagne (« chez nous on ne se moque pas des pèlerins de Compostelle », c’est le genre de petite phrase qui aurait fait mal dans un débat). Quand une branche commence à craquer il vaut mieux strategiquement la couper, c’est le principe de précaution politique.

2) L’anonymat est la garantie des lâches

Pour déclencher cette affaire il fallait qu'un mandataire  du MR s’émeuve du fameux tweet et porte l’affaire à la connaissance de la Libre Belgique. S’il existe vraiment, ce mandataire doit à l’heure qu’il est regarder piteusement le bout de ses chaussures. Protégé par le secret des sources on ne saura jamais qui il est. Et pourtant je trouve que l’information qui consisterait à divulguer son identité serait particulièrement pertinente. On saurait qui est ce libéral si prude ou qui avait envie de déstabiliser le centre Jean Gol et dans les deux cas ce n’est pas inintéressant. Un mandataire (un élu qui réclame des suffrages pour représenter le peuple si je comprends bien le sens des mots) devrait avoir le courage de ses opinions et de ses prises de positions. C’est assez particulier d’apprendre que certains d’entre eux appellent un journaliste en douce pour faire passer un message à l’interne de leur propre parti (évidement si c’est le journaliste qui affabule nous entrons dans une autre dimension, je préfère écarter cette option).  Cet(te) élu(e) exerce un mandat public alors que ce n’est pas le cas de Gaëlle S mais il/elle a préféré la dénonciation au coup de téléphone, la publication dans la presse aux procédures internes.

Je m’interroge au passage sur la nécessité de dévoiler l’identité complète de Gaëlle puisqu’elle n'est pas une personnalité publique. Sans doute mes confrères qui l’ont fait ont-ils peser le pour et le contre. Qu’ils soient conscients qu’un nom jeté en pâture par les médias équivaut à une condamnation : qui prendra le risque d’employer Gaëlle S. malgré ses compétences en droit et en sciences politiques, maintenant qu’une simple recherche sur Google fait remonter des dizaines d’articles consacrés à cette affaire ? 

Au passage, je m’étonne également que des journalistes identifient clairement une personne  quand cela les arrange alors qu’à maintes reprises les tweets de Gaëlle S ont été repris dans des articles qui prétendaient prendre le pouls de la twittosphère.  Personne à l’époque ne mentionnait son attache partisane quand ses messages ciblaient Joëlle Milquet ou Michel Daerden et étaient reproduits dans des quotidiens, ce qui m’a toujours mis mal à l’aise.  La vérité est que notre twittosphère est sous l’influence de quelques propagandistes facilement identifiables mais le plus souvent les journalistes font semblant de ne pas le savoir, c’est trop facile de prétendre avoir un échantillon représentatif sous la main. Un peu de précision, de rigueur et de distance avec les témoignages anonymes ne feraient pas de tort à ma profession. 

3) Le MR lorgne l’électorat catholique

Interrogé par téléphone  par la RTBF pour justifier le licenciement de sa collaboratrice Charles Michel a indiqué que le tweet en question est  « en transgression totale avec les valeurs que le MR prône  (…) le respect pour les religions et le fait de croire ou ne pas croire est un des éléments fondamentaux que le MR défend depuis des années ». En intervenant ainsi le président de parti tente de donner un sens  politique au licenciement et nous offre une possibilité de lecture qui va au delà du traitement préventif de la crise mentionné plus haut. Il ne s’agit plus d’étouffer une affaire avant qu’elle ne dégénère mais de lui donner un sens. Celui-ci est limpide : laïc à son origine, le MR ne  veut aujourd’hui pas choquer un électorat catholique qui l’intéresse fortement. 

On entend très souvent des mandataires, notamment au MR, stigmatiser ce qu’ils appellent un vote communautaire. Leur président, avec ce message, envoie pourtant un message au monde catholique qui se range dans la même catégorie : amis catholiques,  le parti libéral a changé, nous ne sommes plus vos ennemis. Derrière le tweet de Gaëlle apparaît un des enjeux de la campagne à venir coté wallon : les libéraux entendent capter une partie de l’électorat qui traditionnellement vote pour la famille sociale-chrétienne.  Pour cela les libéraux doivent afficher un profil religieusement lisse. Le contraire d’un tweet provocateur.