31 octobre 2015

Impardonnable

Imprudente. Ainsi le premier ministre a-t-il qualifiée la ministre de la mobilité Jacqueline Galant. Imprudente, donc, mais de bonne foi, comme si une faute avouée était à moitié pardonnée. Dans la majorité on retient son souffle et on se racle la gorge. Dans l'opposition on enrage et on se retient : on sait trop bien qu'exiger une démission est le meilleur moyen de l'empêcher, transformer le malaise en show parlementaire sera contre-productif, à trop taper sur la fautive on risque d'en faire une victime. 

La personnalité hors-norme de Jacqueline Galant avec son bon sens populiste et son refus du conformisme en fait à la fois une machine de guerre électorale et une bombe à retardement gouvernementale. Tout le monde le savait. Les formules chocs, les dérapages en interview, un soupçon de xénophobie et une dose de clientélisme local  cela aide à tenir un fief électoral, pas à administrer un département complexe. Jacqueline Galant c'est l'efficacité au détriment de la subtilité. On sait maintenant que la légalité n'est pas non plus son souci premier. On ne s'acharnera pas sur la personne : hériter des compétences comme la SNCB ou le survol de Bruxelles, ce n'est pas une sinécure. A la vérité des dossiers tellement pourris que personne n'en voulait et que le MR a bien été obligé de les ramasser. La faute n'incombe pas à Jacqueline Galant mais à ceux qui ont confectionné l'attelage gouvernemental, dont le souci premier était d'équilibrer les postes entre Micheliens et Reyndersiens, hommes et femmes, hennuyers et liégeois. Dans ce genre d'exercice la compétence n'est qu'une variable parmi d'autres. C'est un état de fait, valable pour plusieurs partis, même si on peut s'en désoler. 

Imprudente, le qualificatif du premier ministre reste faible. Les faits sont les suivants : un premier contrat attribué au cabinet d'avocat Clifford Chance par le cabinet Galant pour une defense en justice sur un dossier précis, ce qui pouvait encore se plaider. Puis une autre mission, encore une autre et au final un contrat de conseil sur l'ensemble du dossier aéroport, pour un total entre 400 000 et 500 000 euros. La technique est connue : cela s'appelle du saucissonage. On procède ainsi pour rester sous les seuils qui obligent à passer un marché public. C'est totalement illégal, cela ne tiendra pas une seconde devant les tribunaux et c'est contraire aux intérêts de l'Etat. La loi comme la volonté de gérer efficacement l'argent public l'imposent  : la mise en concurrence permet d'obtenir le meilleur service au meilleur prix, elle nous préserve du copinage et des arrangements entre amis. Les libéraux qui il y a dix ans critiquaient, avec raison, les dérives d'autres partis ont mis avec l'escarpin de Jacqueline le pied du mauvais côté de la ligne. Charles Michel, qui cumule ici les rôles d'arbitre et de capitaine, se contente d'un carton jaune. Les tribunaux, s'ils sont saisis,  sortiront la carte rouge.  On ne peut pas croire qu'au cabinet Galant personne ne connaisse les procédures de marché public (si c'est le cas, il faut recruter d'urgence). On est même persuadé que la ministre elle-même,  en tant que Bourgmestre de Jurbise, à du rédiger ou relire plus d'un appel d'offre dans sa carrière. Comme tous les étudiants en droit ou en gestion administrative elle sait même probablement qu'à partir de 200 000 euros, dans un marché de service, cet appel d'offre se doit d'être européen (ce qui signifie une publicité et des délais qui permettent à des entreprises situées en dehors du territoire national de concourir). 

Pour démissionner c'est maintenant trop tôt ou trop tard. Trop tôt car il faut attendre de voir si un cabinet concurrent porte plainte, ou si le parquet ou les services européens se saisissent du dossier. Dans ce cas l'affaire sera réglée. On imagine mal la ministre pouvoir résister à une mise à l'instruction, possible, du dossier. Trop tard car le mal est fait. Partir maintenant donnerait raison à l'opposition, sanctionner un collaborateur passerait pour de la lâcheté. Au mieux on peut imaginer une reprise en main du dossier par un autre ministre. Ce serait une sanction sans être un désaveu général et un souci d'efficacité. Jacqueline Galant est aujourd'hui affaiblie. En difficulté politiquement et médiatiquement, ses chances de sortir du bourbier de l'aéroport semblent extrêmement faibles. Pour réussir dans ce dossier il faut  de l'autorité, de la créativité, le sens de la diplomatie et du compromis et une solide expertise. Ces qualités lui font défaut. Pire, le cabinet Clifford Chance, qui doit l'épauler,  n'est pas un habitué de cette matière complexe. Cela ne l'a pas empêché de négocier un tarif horaire qui est deux fois plus élevé que les cabinets spécialisés. Un montant qui achève de jeter le trouble. Imprudente n'était pas le bon mot. 

18 octobre 2015

Ceci n'est pas un couple... Mais c'est ma ville


Petit retour en arrière. Il y a dix mois je vous écrivais ici tout le bien que je pensais d'une toute nouvelle pièce de théâtre. Djihâd, que je venais de voir à l'espace Pôle Nord en était à ses toutes premières représentations et le succès allait être phénoménal.
J'étais de nouveau dans la même salle hier pour voir et entendre Ismaël Saïdi dans "Ceci n'est pas un couple". Sur scène un homme et une femme débitent face au notaire (une voix off, on ne le verra donc pas) les frustrations et incompréhensions qui les amènent à se séparer. Lui est musulman, elle est juive. A l'opposition Mars/Venus se superposent les différences  de pratique religieuse, le poids des familles, les interdits culturels et une grosse dose de clichés.  On se moque, avec gentillesse, du rabbin ET de l'imam,  du Chabbat ET du Ramadan. Ecrite avant Djihad, la pièce explore les thèmes de prédilection d'Ismaël : les préjugés, la peur de l'autre, la différence culturelle et la religion dévoyée (elle éloigne les hommes au lieu de les rapprocher).  Face à lui une pétillante Audrey Devos apporte tonus, rythme et légèreté. On rit (beaucoup), on chahute (un peu) la salle prend parti et pousse les acteurs à improviser (parfois). A l'évidence le public passe une bonne soirée.
La bonne idée est d'avoir fait précéder la pièce d'un petit intermède musical (on y chante ... en néerlandais) et d'un sketch qui dénonce la culture du harcèlement de rue (quand une fille dit non, c'est non). C'est sans prétention, mais ce serait utile, comme pour Djihad, de le montrer dans les écoles.
Comme il y a dix mois ce qui me frappe est autant dans la salle que sur la scène. Nous sommes au moins 200, serrés les uns contre les autres (on se contentera de cette estimation car le chiffre réel  fâcherait surement les pompiers). Nous sommes dans le quartier nord, au pied de grandes barres d'habitations. A l'entrée un jeune homme souriant vous tient amicalement et poliment la porte. Il y a des jeunes, des mères en foulard, toutes les teintes de peaux et autant de cheveux crollés que de coiffures lisses. Ce public, représentatif de la sociologie de Bruxelles, a trouvé le chemin du théâtre et ce n'est pas grâce aux grandes salles du centre ville qui  sont pourtant subventionnées pour cela (directeurs et metteurs en scène compris).  Ici ce sont les vrais bruxellois qui sont dans la salle et l'enthousiasme ne se contente pas de quelques applaudissements polis. Si Paul Van Stalle avec Bossemans et Coppenolle a créée le théatre bruxellois des années 1930, Ismaël Saïdi ( et quelques autres comme Abdel Nasser ou dans un autre registre le très talentueux Dominique Breda) raconte sur les planches ce qu'est vraiment notre ville en 2015.

Anne-Marie Lizin : le volcan au service des femmes et des opprimés (souvenirs personnels)

Anne-Marie Lizin est un ouragan, une tornade, un volcan. Si vous lui résistez,  elle vous renverse où vous contourne, mais au final elle passe quand même. C'est l'image qui m'est venue à l'esprit en apprenant sa disparition ce samedi. 

Mes premiers souvenirs de la bourgmestre de Huy  confirment une sacrée réputation. Nous sommes en 1986 (je ne suis pas encore en Belgique) elle récupère un enfant enlevé par son père en Algerie. Son plan : passer les contrôles avec un faux passeport. La fin justifie les moyens expliquera-t-elle. La lutte contre les rapts parentaux, et le droit des femmes en général vont l'occuper une bonne partie de sa carrière. C'est un engagement au sens noble du terme. Anne-Marie Lizin ne supporte pas les discriminations et l'oppression. Quand elle les croise, elle fonce tête baissée. Cela l'amène à se mettre du côté des femmes, à s'intéresser aux pays en développement, à rencontrer les  mouvements de libération, et à  toujours prendre le parti des rebelles contre celui des dictateurs.  Le féminisme, l'international et la ville de Huy : vous avez les trois pôles de son activité.

"Anne-Marie Lizin ? Si tu ne la reconnais pas, elle te reconnaîtra, elle est toujours sur la photo" me glisse un cameraman la première fois que je dois recueillir sa réaction.  Anne-Marie Lizin a l'art de se placer. Elle sait quand la caméra va tourner, elle déboule toujours au premier rang à ce moment là et personne n'ose alors lui dire que ce n'est pas sa place. Elle a fait le coup des dizaines de fois. Au Brésil avec Lula, à Bruxelles avec la famille royale, au proche-orient avec tout le monde, et même à New-York lors d'une rencontre entre Boutros Boutros-Ghali et Jean-Luc Dehaene où elle s'invite au petit déjeuner, chacun des convives (ils sont quand même respectivement secrétaire général des Nations Unies et premier ministre ) pensant que c'est l'autre qui l'a conviée. 
Quand elle apparaît,  ce n'est pas pour faire plante verte ou élément de décor : elle prend toute sa place, parle de sa voix haut perchée mais forte, tous les regards se tournent, elle est au cœur de l'action et aimante flashs et caméras. Quand elle devient président du Sénat, j'ai vu un Herman De Croo s'en froisser : comment la présidente du Sénat peut-elle se croire à ce point importante qu'elle vole sans vergogne la vedette au président de la chambre qui a théoriquement plus de pouvoir ? Comme il est malin et galant Herman finira par s'en amuser. Ensemble, ils incarnent l'institution parlementaire des années Verhofstadt  et Herman ne manquera plus de s'assurer, avec humour,  qu'elle est bien placée pour la séance de pose. Du coup Anne-Marie possède  une incroyable  collection de photos : de Yasser Arafat à Shimon Perez, en passant par le Dalaï Lama, on pourrait enseigner l'histoire du  XXieme siècle en s'appuyant sur son portfolio. 

Dans les couloirs de RTL elle me claque une bise sans me demander mon avis. Moi qui préfère garder une certaine distance et vouvoyer les politiques,  me voilà servi. Anne-Marie Lizin, volubile, vous laisse à peine le temps d'acquiescer, ne répond jamais  aux objections, et, toujours, pressée, vous prend le bras pour passer d'une pièce à l'autre. "Elle est incroyable, hein ?" me lance ma cheffe de service Katryn Brahy, rigolarde. Ces deux-là ont le même ressort : toniques, souriantes, énergiques et toujours en mouvement .  Anne-Marie Lizin, qui a épousé un journaliste,  a tout compris aux médias. C'est une bonne cliente, elle s'exprime clairement, avec une dose de passion, c'est vivifiant. Elle est disponible et surtout elle aide nos auditeurs à comprendre le monde. En radio je l'invite à plusieurs reprises pour commenter l'actualité internationale. Dans ce registre elle est du calibre d'un Josy Dubié ou d'un Louis Michel : engagée et pédagogique. 
Sa capacité à réagir sur beaucoup de sujets et son goût des médias ne sont  pas toujours appréciés.  Dans les rédactions on parle de "mémé Zinzin" et on moque un goût vestimentaire qui n'est pas le bon chic parisien.  En matière textile Anne-Marie fait rarement dans la sobriété. 

2007, c'est la fin de sa présidence au Sénat. Je suis en bas du grand escalier escalier rouge, elle est tout en haut. Je l'interpelle. Un huissier et un agent de sécurité nous interdisent de monter. Elle a décidé que la presse audiovisuelle ne pouvait plus circuler dans les couloirs. C'est le revers de la médaille. La liberté de la presse c'est bien pour les autres, pas quand on est soi-même concerné. Fini les interviews caméra au poing qui ont fait les délices des JT (et un peu de ma réputation). C'est l'épique époque  des affaires. Le PS tremble à Charleroi, et Patrick Remacle, à la RTBF, enquête sur une distribution de tracts à Huy par des employés communaux en plein service. La presse s'intéressa encore à un courrier au juge d'instruction, à ses cartes de crédit ou à la gestion de l'hôpital local.  Anne-Marie Lizin aime tout d'un coup beaucoup moins les médias. Elle se replie, nie l'évidence et toise son monde. Tous les indices étaient là depuis le début : le goût des voyages et des grandes rencontres, l'utilisation des escortes à moto, et la fin qui justifie les moyens. Au contact du pouvoir Anne-Marie Lizin a manqué de prudence, elle n'a plus clairement séparé ce qui la servait ce qui servait l'intérêt général. Dans un PS qui lance une opération mains propres son manque de discernement passe mal. Elio Di Rupo et Anne-Marie Lizin c'est l'eau et le feu. Il veut éteindre l'incendie, elle fait mine de ne pas comprendre et sera priée d'aller crépiter plus loin. Même le communiqué qui salue sa disparition ce samedi reste glacial, signe qu'on ne lui a pas vraiment pardonné. 

Pourtant, hors du PS et hors de Huy il ne restera plus que quelques petites flammèches. Une histoire de voitures embouties sur le parking de la maison communale. Un exil à Paris. Quelques interviews à intervalle régulier. Des anecdotes au regard de ses engagements de départ : le droit des femmes, la défense des opprimés et le rayonnement d'une ville qui lui doit beaucoup. 
La volcanique Anne-Marie Lizin a fait en sorte que sa dernière braise s'éteigne à Huy. 

04 octobre 2015

Comment le gouvernement Michel change le logiciel de la Belgique

L'exercice s’impose aux gouvernements comme aux écoliers : se soumettre à la critique et regarder le chemin parcouru. Mesurer les progrès déjà réalisés et ceux qui restent à accomplir, les objectifs atteints ou les manquements manifestes. Un an après sa prestation de serment (le 11 octobre 2014) le gouvernement Michel entre dans une période d’évaluation de son action et de sa cohésion. Les examinateurs sont nombreux : la presse et les politologues qui seront sollicités pour célébrer l’anniversaire, les syndicats qui manifestent mercredi et l’opposition qui se prépare à la rentrée parlementaire. Le discours de politique fédérale, le second mardi d’octobre, fait toujours figure de grand oral dans ces occasions-là. 

Ce week-end mon confrère de l’Echo Joan Condijts écrivait que le bilan du gouvernement fédéral n’etait pas « disruptif » : la rupture n’etait finalement pas aussi forte qu’annoncée, beaucoup de politiques étant maintenues ou poursuivies. C’est dans doute vrai si l’on s’en réfère aux politiques socio-économiques ou fiscales (le prisme naturel de l’Echo) : il n’y a pas eu de grand soir et la majorité ne peut changer tout du jour au lendemain, une partie importante des leviers étant désormais dans les mains des régions. La nouvelle majorité ne peut s’en prendre qu’à elle-même puisqu’elle avait fait bruyamment fait savoir que gouverner sans les socialistes serait une véritable libération. On allait voir ce qu’on allait voir. Les supporters les plus impatients sont donc déçus. Le gouvernement composé de partis tous classés (plus ou moins)  à droite se chamaille et se paralyse, les ministres ne paraissent pas plus compétents qu’avant, les difficultés budgétaires sont les mêmes, et le fossé linguistique se creuse.   Même le fameux « tax-shift » (basculement fiscal) présenté comme une rupture fondamentale relève plus de la réformette cosmetique que de la révolution. 

Si les milieux économiques affichent leur déception il ne faut pas sous-estimer une nouvelle donne essentielle : celle d’un nouvel équilibre politico-linguistique. Douze mois après son installation le gouvernement fédéral tient bon (il tient tellement bon même  que le président du PS se contente d’estimer que « ce serait une bonne chose qu’il tombe » sans donner le sentiment d’oeuvrer vraiment  à la chute de son adversaire). Son seul maintien pérennise un état de fait qu’on a suffisamment jugé atypique lors de son installation : un déséquilibre nord-sud réellement révolutionnaire (beaucoup au PS le tenaient pour tellement improbable qu'ils spéculaient sur sa rapide disparition) même si l’actualite tend à le faire oublier.

 Jusqu’ici les gouvernements belges reposaient sur une notion de parité : on tentaient d’approcher une majorité dans chacune des deux grandes communautés. Néerlandophones et Francophones fondaient des majorités qui se complétaient (mais aussi se neutralisaient ou paralysaient parfois). Depuis les années septantes la suprématie néerlandophone était manifeste : le poste de premier ministre, les grands portefeuilles, l’impulsion dominante étaient dans la  main du nord, mais de Martens  à Leterme en passant par Dehaene ou Verhostadt on veillait à mettre en œuvre une partition collégiale, le concerto Belgique s’ecrivait pour deux pianos : un francophone et un néerlandophone et on prenait bien soin de nommer un gouvernement par les noms du premier ministre et du premier vice-premier (Martens-Gol ou Dehaene-Di Rupo) histoire de souligner qu’il y avait deux compositeurs. 

Aujourd’hui la majorité gouvernementale est une majorité dominée par les partis néerlandophones. L’ecrire n’est pas une critique mais une simple constatation. La rupture est dans cette observation parlementaire. Avec le gouvernement Michel la Belgique politique a changé de logiciel. Nous sommes passés d’une Belgique politique  bi-communautaire à une Belgique flamande, dans laquelle les francophones ne jouent plus qu’un rôle d’appoint. C’est un précédent. Il pourrait fort bien devenir la règle, et dans ce cas il y aura bien  un avant et un après gouvernement Michel. 

Ce changement de logique parlementaire induit que les  thématiques politiques qui font l’agenda flamand (la compétitivité, la sécurité , l’immigration) s’imposent au niveau fédéral, alors que des  thèmes plus portés au sud (l’emploi, la protection sociale, l’environnement) deviennent moins prioritaires. Dans ce contexte la nomination d’un  bourgmestre  issu de la minorité flamande à Linkebeek agit comme un révélateur : celui d’une démocratie où le pouvoir est aux mains des néerlandophones. Bien sûr, le conseil d’Etat a donné tort à Damien Thiery, Lisbeth Homans est dans son droit et les affaires flamandes ne relèvent pas du fédéral. Mais on ne fait pas de la politique uniquement avec des notions juridiques, la symbolique d’une élection bafouée est plus forte que la séparation des pouvoirs. L’opposition francophone qui multiplie les communiqués sur l’affaire de Linkebeek ne s’y est pas trompée.  L'affaire est embarrassante pour un premier ministre mis en difficulté par son principal allié, mais qui ne peut politiquement pas intervenir sur le terrain régional. Elle démontre que la NVA a bien plus d'attention pour ses électeurs que pour le locataire du 16 rue de la loi. Le couac de Linkebeek résonne politiquement plus fort qu'un concert de Stromae.

Au delà du cas particulier de Linkebeek, on  aurait donc tort de sous-estimer l’ évolution fédérale  vers une Belgique désormais plus flamande. C’est bien là,  plutôt que dans la nomination du bourgmestre d’une commune sympathique mais  de taille modeste,  dans une supposée  flamandisation des nominations  ou dans des réformes économiques qui n’arrivent pas,  que le gouvernement Michel a changé la Belgique . 
Avec un effet probable : celui de réveiller des  régionalismes wallons et bruxellois en sommeil depuis un quart de siècle. Face au  logiciel fédéral flamandisé, la  prochaine réforme de l’Etat pourrait bien devenir  une revendication  francophone.