Myopie : trouble de la vision qui altère la vue de loin. De près le myope voit bien, de loin tout est flou. La myopie est d'abord une affaire de génétique, une maladie héréditaire, mais elle peut aussi avoir des causes environnementales ou comportementales : lire beaucoup, passer du temps sur un écran, travailler avec un éclairage insuffisant renforce les risques myopie. La myopie est très développée en Asie, plus de la moitié des asiatiques sont concernés, elle touche un américain sur trois et un européen sur quatre. Contrairement aux idées reçues ce n'est pas une maladie de vieux, parmi les moins de 20 ans , 20% sont myopes.
Pourquoi vous parler de myopie ? Parce que depuis quelques jours nous sommes atteints de myopie collective. C'est un trait dominant des médias. Pour séduire le public il faut s'intéresser à ce qui est près plutôt qu'à ce qui est loin et préférer l'anecdote au discours général. Le myope focalise, ce qui veut dire qu'il concentre son regard sur ce qu'il a devant les yeux. Depuis deux jours nous focalisons sur le jet d'une paire de vêtements par une déléguée syndicale. Le myope a vu la vidéo qui dure 50 secondes, il n'a pas vu les dizaines de milliers de belges qui faisaient la grève, ni les dizaines d'autres milliers qui renonçaient à travailler par empêchement plus que par conviction. Le myope retient des chasubles rouges, il ne perçoit pas les nuances de verts et de bleus qui existent sur les piquets de grève.
Cette tendance à prendre les problèmes par le petit bout de la lorgnette est permanente. La myopie c'est par exemple résumer le bilan du gouvernement à la dernière interview du premier ministre. Vous noterez au passage que le premier ministre, comme l'auteur de cette chronique, portent des lunettes de myope. La myopie c'est ne voir dans la NVA que les seules provocations de Jan Jambon. La myopie c'est ne pas prendre le temps de s'arrêter ce qui s'est passé au Pakistan : 132 enfants tués dans leur école. Aller à l'école pour s'instruire et ne pas en revenir est une barbarie absolue. Pourtant cette tuerie occupe moins de place dans nos journaux que la prise d'otage de Sydney il y a deux jours. Nous sommes myopes parce que nous regardons le monde au travers des lunettes d'Internet et de la télévision. Il y a beaucoup de caméras et d'ordinateurs en Australie ou à Namur, il y en a moins à Peshawar. Moins d'images, c'est moins d'émotion, moins de place au café du commerce, moins de prise de conscience : au final ces 132 enfants nous occupent donc moins que notre amie Raymonde.
Est-ce grave ? Oui parce que cette myopie intellectuelle traduit un manque de discernement, une incapacité à voir à long terme. Sans vision, pas d'avenir, le myope raisonne à courte vue. Il existe des verres correcteurs, on peut même subir des opérations pour corriger la myopie au sens physique. Contre la myopie médiatique il faut parfois changer de journal, ou, par moment, relever la tête.
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