31 mars 2008

Olivier Chastel n'est pas diplomate


Le secrétaire d’état aux affaires étrangères Olivier Chastel s’est retrouvé dans le grand bain ce weekend : invité à remplacer Karel de Gucht lors d’une réunion des ministres européens des affaires étrangères. Pendant que son patron était en vacances en Italie c’est donc le carolo qui portait la voix de la Belgique à Ljubljana, capitale de la Slovénie. Invité ce matin sur Bel RTL Olivier Chastel a préféré appeler un chat un chat : la plupart des états membres n’étaient pas prêts à évoquer un éventuel boycott de la cérémonie d’ouverture des JO lorsqu’on a évoqué la situation au Tibet. Le belge vise les grands pays (Royaume Uni, Allemagne) :« ils n’ont pas du tout intérêt à ce que l’on froisse la chine ». La déclaration a le mérite de la franchise, ce qui n'est sans doute pas pour déplaire à son ministre de tutelle. On imagine aisément le tandem que pourraient former ces deux là : un secrétaire d'état qui dirait tout haut ce que son ministre pense tout bas.

Regardez l’interview ici.

25 mars 2008

L'accord de gouvernement et son brouillon

D’un coté le texte de l’accord gouvernemental 42 page recto-verso (à lire ici). De l’autre un projet d’accord de 48 pages recto avec une police de caractère un peu plus petite. Le premier texte, public, a été édité le mardi 18 mars à 15H. Le second (en réalité le premier dans l’ordre chronologique) est un peu plus vieux. Il s’agit d’une version qui date du lundi 17 mars à 01h15, version qui n’aurait pas du sortir des mains des négociateurs. Que s’est-il passé entre ces deux documents en un peu plus de 24 heures ? Je viens de passer ma matinée à examiner les deux versions. A ce stade avancé de la négociation 95% du document final etaient déjà sur la table 24 heures avant la fin des discussions. Mais un constat s’impose : en 24 heures les négociateurs ont surtout évité d’être trop précis, gommant quelques paragraphes et supprimant les chiffres. Comme un photographe qui retoucherait sa photo, ils ont rendu flous certains passages sensibles.
Pour ceux que cela interesse et qui ont un peu de courage (il faut reconnaitre que nous avons parfois des lectures plus agréables) je vous propose une comparaison des deux documents.

Ainsi la première page de l’accord sera amplement remaniée. Le préambule de la version finale est donc plus lisible. Ce n’est qu’une question de style, pas de fond. Mais il y a aussi entre le brouillon et la copie finale quelques modifications plus substantielles.

Ainsi la partie sur les impôts sera remaniée et les négociateurs retireront tous les chiffres du document final. Ainsi si la version du 17 mars contient la phrase « une phasage sur plusieurs années doit permettre de faire passer progressivement, dans le courant de cette législature le montant de la quotité exempté d’impôt dans le chef de personnes physique à 8400 euros, revenu d’insertion pour une personne » ce passage est remplacée le 18mars par un très vague « le gouvernement a décidé de relever la quotité exonérée d’impôt en vue d’augmenter le pouvoir d’achat des gens ».

La mention, déjà mise entre parenthèse dans le document du 17 mars, « simplification des tranches du barème de calcul d’impôt des personnes physiques, en ramenant le nombre de tranches barémiques de calcul de l’impôt de 5 à 3 tranches, en supprimant les tranches de 30 et 45% » est remplacée par « dans cette législature, le Gouvernement fera un pas complémentaire en vue d’une limitation du nombre de barèmes intermédiaires »
Vous conviendrez que c’est moins précis...

Le paragraphe sur les pensions est également un de ceux qui sera le plus réécrit. Première version : « le gouvernement poursuivra à adapter (sic) les pensions au bien-être et en plus il fera un effort particulier pour les pensions les plus anciennes et basses tant pour les travailleurs salariés que pour des travailleurs indépendants. Au sein de cette législation, il souhaitera réaliser une augmentation de 8% pour cette catégorie ». Version finale : « Il convient de poursuivre l’augmentation des pensions les plus basses et les plus anciennes et d’élargir le nombre de bénéficiaires pour permettre qu’un maximum de pensionnés puissent obtenir une augmentation de leur pension légale en vue d’augmenter leur pouvoir d’achat ». Le chiffre de 8% a disparu en route.


Au chapitre pauvreté le gouvernement annonce un « plan ambitieux de réduction de la pauvreté et d’augmentation du pouvoir d’achat. » La première version poursuit « il confirme son objectif qu’à terme les allocations de base ne devraient pas se situer à un niveau inférieur au seuil européen de pauvreté. A cet égard il ferra un effort annuel qui est compatible à celui de l’année dernière de 250 millions » (soyons honnête, le chiffre est « entre crochets » ce qui signifie que tout le monde n'a pas marqué son accord) , cela devient « a cet égard il fera un effort annuel » . Ici aussi le montant a disparu de la version publique.

Au chapitre justice, en revanche, la 2ième version est légèrement plus précise que la première. Le texte initial indiquait « la loi concernant la libération conditionnelle sera évaluée et le cas échéant adaptée. Cette évaluation portera notamment sur la possibilité pour le juge de fond de fixer pour des infractions très graves qui donnent lieue à une mise à disposition obligatoire, la partie minimale de la peine qui doit être exécutée ne prison ». La version finale ne parle plus d’évaluation et indique « la loi relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté sera adaptée pour prévoir la possibilité pour le juge de fond de fixer, pour des infractions très graves qui donnent lieu à une mise à disposition obligatoire, la partie minimale de la peine qui doit être exécutée en prison et qui peut se situer entre 1/3 et 2/3 de la peine infligée ».

Le chapitre migration est entièrement réécrit. L’introduction « notre pays ne peut avoir d’autre vocation que celle d’un pays ouverte et tolérant. L’ouverture au monde et la tolérance créent des droits mais génèrent également des devoirs » et les deux paragraphes suivants sont supprimés. Le chapitre commence directement par « Le gouvernement entend mener une politique d’immigration humaine, équilibrée et ferme qui tient compte de la politique d’insertion et d’intégration des communautés ». Dans la version initiale les critères permettant de bénéficier d’une régularisation occupent presque une page. Ce texte est deux fois plus court dans la version finale.

Au chapitre institutionnel après avoir évoqué la première phase de réforme de l’Etat, la version du 17 mars se termine par « le Gouvernement entend poursuivre ce travail et déposer une proposition de loi spéciale avant la mi juillet, afin de poursuivre la mise en œuvre de davantage d’homogénéisation et de l’augmentation de la cohérence de compétences à chaque niveau de pouvoir ». Version du lendemain « le gouvernement fera avant la mi juillet une déclaration à la chambre des représentants sur le contenu du second paquet comme annoncé dans les développements de cette proposition. Les textes de loi nécessaires y seront adjoints afin de les approuver avant les vacances parlementaires. »
Si le style des deux versions ne permet à aucun d’entre elles d’entrer en lice pour le prochain Goncourt il faut confirmer qu’un texte législatif est bien attendu pour juillet.

Une version antérieure indiquait plus précisément le menu institutionnel à négocier et faisait référence : au marché de l’emploi (sans que la solidarité interpersonnelle et la sécurité sociale ne puisse être remise en cause précise ce projet de texte), à certains aspects de la politique familiale, à la fonction publique, à la zone maritime, à la politique de poursuites des infractions en matières régionales, au renforcement du comité de concertation, à la réforme du Sénat, à la création d’une circonscription fédérale, à une solution négociée pour BHV, à la responsabilisation financières des entités fédérées et à un élargissement de l’autonomie fiscale. L’ensemble de ce paragraphe était déjà biffé dans la version du 17 mars. On peut soit en conclure qu’il n’y a pas eu d’accord sur cette liste, soit que celle-ci ressortira le moment venu, quand les négociateurs estimeront nécessaire de sortir du flou artistique.

24 mars 2008

Cris et chuchotements


L’équipe Leterme est désormais en période d’installation. Vous trouverez ici la liste des ministres et leurs attributions. La confection du gouvernement ayant été abondement commentée dans la presse, ce blog a donc pris un peu de retard, mais permettez moi de revenir brièvement sur les épisodes précédents.

Les flamands hurlent plus que les francophones.
C’est ce qu’affirment tous les négociateurs que j’ai rencontré. En négociation les chefs de file néerlandophones perdraient régulièrement leur calme et manieraient facilement l’insulte. L’ambiance se serait nettement détériorée par rapport aux négociations précédentes (sous l’égide de Guy Verhofstadt pour former le gouvernement violet, mais aussi lors des discussions sur BHV lors de la dernière législature ou à l’occasion du dossier DHL). «On a franchi un cap, il existe désormais un climat ouvertement hostile aux francophones » commente l’un. « Ils n’ont plus aucune éducation : cela crie, insulte, et on se permet même de roter à table » regrette un autre. « Jamais vu ça, commente un troisième : Bart Sommers pique une crise toutes les heures, Yves Leterme est plus mesuré mais il "pète aussi les plombs" de temps à autre, les flamands sont nettement plus irrationnels que nous». Témoignage d’un autre sur les habitudes francophones « On voit tout de suite quand Joëlle s’irrite, mais elle ne crie pas. Elio et Didier ne se sont que très rarement énervés ». Dernière confidence d’un négociateur : «A l’intérieur Reynders était beaucoup plus zen que sur le pas de la porte. Lors de la crise de l’avant-dernière nuit il est même allé dormir ».

Le CDH pris de vitesse par le MR
L’info m’était donnée vendredi soir : le CDH envisage de faire monter Benoît Cerexhe à la communauté française. Idée des centristes : il faut aussi que le gouvernement bruxellois soit représenté au sein de la communauté. Face à Rudy « super wallon » Demotte, le CDH voulait aussi donner un exemple de bonne gouvernance et de coopération transversale. Le soir même une source CDH confirmait qu’un tel scénario était là l’étude mais qu’il était prématuré d’en parler. Raté pour le CDH : « le Soir » a sorti l’info samedi matin. Pire, le MRLB (libéraux bruxellois) en se prononçant dans un communiqué pour un tel remaniement a pris le CDH de vitesse. Si la montée du bruxellois se concrétise rapidement les libéraux pourront donc dire que c’était leur idée. Les centristes sont également confrontés à une difficulté interne : pour permettre à Benoit Cerexhe d’intégrer la communauté, il faut nécessairement retirer l’une ou l’autre compétence à Marie-Dominique Simonet ou Catherine Fonck…

Laurette Chef Scout
L’installation d’un gouvernement, c’est tout un programme. Prestation de serment, photo avec Albert II, photo au parlement, premier conseil d’installation, déclaration au parlement. Dans l’équipe ceux qui sont là depuis 1999 sont assez peu nombreux (Onkelinx et Reynders). D’après les témoignages la vice-première PS a donc pris le premier ministre sous son aile protectrice jeudi en lui indiquant, étape après étape, la marche à suivre « maintenant la photo, maintenant le dossier X, les signatures, etc.. » . Il faut dire que Laurette est assise à droite d’Yves Leterme dans la salle du conseil, une place privilégiée pour lui glisser l’un ou l’autre conseil à l’oreille. Didier Reynders, en tant que 1er vice premier est lui en face d’Yves Leterme… juste à côté de son amie Joëlle Milquet.

Service minimum pour les applaudissements.
Tout le monde s’accorde là dessus : le nouveau premier ministre n’est pas un orateur particulièrement charismatique. Il ne faut pas compter sur Yves pour abuser des trémolos et des formules lyriques propres à enflammer l’auditoire. Le discours de politique générale fut donc à son image : sérieux et sans fioritures. Depuis la tribune de presse où je me trouvais, le spectacle était quand même étonnant, et pour tout dire, presque odieux. On ne s’est pas privé dans les rangs de la majorité pour afficher un réel manque d’enthousiasme. Patrick Dewael va ainsi demander deux fois du café pendant le discours du nouveau boss. Olivier Maingain lit ostensiblement son courrier. Au moment des applaudissements, Elio di Rupo tape dans ses mains assez longuement, mais les travées PS derrière lui sont clairsemées et les parlementaires rouges arrêtent la claque au bout d’une minute. Même attitude sur les bancs du MR, ou Olivier Maingain ne lève pas la tête de son courrier et tapote sur son pupitre sans que l’on sache s’il s’agit vraiment d’un applaudissement. Seuls le CDH et le CD&V applaudissent vraiment. Quelques minutes plus tôt le VLD avait pourtant bruyamment ovationné Guy Verhofstadt lorsqu’Yves Leterme lui avait rendu hommage. Le contraste, je l’avoue, met mal à l’aise. Yves Leterme, qui ne fait que lire un texte approuvé par l’ensemble de la majorité, ne mérite pas çà.

19 mars 2008

Les régularisations en échanges des peines incompressibles


Si toute la nuit de lundi à mardi fut nécessaire pour s’en sortir c’est parce que les négociateurs sont passés à deux doigts du gouffre sur le chapitre immigration. Voici résumé en une phrase les dessous de la dernière ligne droite du gouvernement telle que me l’on racontée plusieurs participants (dans mon jargon on écrit « vérifié à plusieurs sources », tout en sachant que les journalistes ne peuvent jamais que reconstruire des parcelles de vérité). Lundi soir peu avant de minuit le groupe de travail immigration, animé par Patrick Dewael (VLD) , Philippe Moureaux (PS) Jo Vandeurzen (CD&V) Charles Michel (MR) et Benoit Dreze (CDH) , trouve un accord. Quelques minutes plus tard le texte est recalé en conférence des présidents. Les libéraux, et notamment Didier Reynders le trouve déséquilibré. Pour être plus précis : les libéraux demandent que l’on soit aussi détaillé dans le chapitre exécution des peines que dans le chapitre immigration. Philippe Moureaux, qui négocie en continu depuis quelques jours déjà, pique une des colères dont il a le secret. Le socialiste, excédé, veut rompre les négociations. D’après ses proches ce n’était pas du cinéma. On envisage de rouvrir tous les dossiers. Pour faire baisse la tension Yves Leterme suspend les débats et évite soigneusement de convoquer une pleinière. Il rencontre les présidents en petit groupe (libéraux d’un coté, PS- CDH de l’autre, et tête avec Etienne Schouppe pour le CD&v). On commande des pizzas, qui, confidence de négociateurs, mettront un peu de temps à arriver. Le duo Reynders- Di Rupo va se réconcilier sur un troc. Le chapitre immigration est maintenu, mais la formulation sera moins précise, et on reverra, pour l’étoffer, le passage sur les libérations conditionnelles. Dans les cas les plus graves (en coulisse on parle des meurtres accompagnés de viols ou de tortures ou liés à une activité terroriste) le juge pourra accompagner la peine d’une mention qui interdit toute libération avant que les 2 tiers de la sentence ne soient purgés. C’est le principe des vases communicants. Basique, mais efficace.

NB : la Libre Belgique développe des infos sensiblement comparables aux miennes ici.

18 mars 2008

Un couac dans la communication

La scène se passe lundi. Les porte-parole de l'équipe Leterme ont rendez vous pour préparer la mise en image de la sortie de crise. Lors de cette réunion se retrouvent donc les conseillers d'Yves Leterme, Didier Reynders et Bart sommers. Soit "l'aile droite" du gouvernement. Les communicants du CDH et du PS ne sont pas là. Pas prévenus affirment-ils. En apprenant la nouvelle les socialistes s'étranglent. En face on temporise : ce serait un malentendu, le message, transmis par l'intermédiaire des présidents aurait mal été compris. La réunion MR-VLD-CD&V sera finalement assez courte... et un autre rendez vous, avec les 5 attachés de presse sera organisé mardi midi.

Le texte sans les chiffres


Au jeu des chiffres et des lettres l’équipe Leterme partirait avec un sérieux handicap. Dès qu’il s’agit de manipuler les chiffres la pentapartite devient subitement muette. Ce soir je peux vous proposer de consulter ici l’accord de gouvernement. Je ne peux pas en revanche vous informer sur l’ampleur des mesures prévues, leur coût ou leur éventuel phasage.
Argument avancé par Yves Leterme et les présidents de parti qui le soutiennent : il ne faut promettre Noël avant les vacances de pacques, l’accord de gouvernement fixe les objectifs, leur concrétisation se fera pas à pas lors des contrôles budgétaires des années à venir. Cela pourrait passer pour une sage décision : il n’est pas idiot de vérifier les marges dont on dispose avant de délier le porte-monnaie. Cela passera sans doute pour un exercice de flou artistique. Quand rien n’est détaillé, rien n’est fixé. Chaque mesure annoncée ici devra donc faire l’objet de nouvelles négociations et d’un nouvel équilibrage. Le débat va se poursuivre, et ce n’est pas forcément très rassurant.

L'accord de 6h20

La nouvelle vient de m'être confirmée à plusieurs sources. Les négociateurs viennent de se séparer sur un accord. Contrairement à ce que l'on pouvait craindre ce n'est pas le chapitre économique et social qui semble avoir mobilisé les présidents de parti toute la nuit, mais l'immigration et la réforme de la loi Lejeune sur les libérations conditionnelles. Les négociateurs vont maintenant se diriger vers les journalistes et faire un passage par les studios des radios avant de rejoindre les bureaux de parti.

17 mars 2008

Sortie de crise

Je n'ai pas posté de billet sur ce blog depuis quelques jours déjà. Une période de travail intense m'en tient plus éloigné que je ne le souhaite. La préparation de l'interview de 7h50 sur Bel RTL, l'un ou l'autre reportage pour les journaux de RTL TVI et surtout la préparation de la suite de la semaine occupent l'essentiel de mes journées. Il importe pour une rédaction comme la nôtre de ne pas rater ce moment là. Merci de patienter un peu pour des analyses plus détaillées. A l'heure ou je rédige ce court billet on peut cependant parier sur une sortie de crise rapide. L'accord de gouvernement n'est plus qu'une question d'heures et Yves Leterme succédera sans surprises à Guy Verhofstadt jeudi midi.

12 mars 2008

Elio, en direct des négociations




Cela fait quelques jours que cela dure. Le mouvement réformateur a visiblement décidé de se démarquer de ses futurs partenaires (le mot n'est pas le plus approprié) de la probable majorité. Devant les caméras et les micros Didier Reynders ne rate pas une occasion de souligner sa différence et d'éreinter ses petits camarades de négociation francophones. "C'était plus facile sans les socialistes" lançait ainsi le président des réformateurs il y a quelques jours avant de préciser que si les rouges étaient de retour c'était, selon lui, à cause/grâce (biffer la mention de votre choix) de/à Joëlle Milquet. Ce mercredi les libéraux du nord et du sud estimaient que la négociation en cours courrait les mêmes risques que celles de l'orange bleue et imputait implicitement la responsabilité des blocages au CDH. Elio Di Rupo n'a, dans un premier temps, réagit que mollement face aux caméras des confrères stationnés au 180 rue royale, batiment qui abrite le cabinet Leterme. Mais il a mis ce soir en ligne un billet très interessant sur son blog.


Cela commence par un constat qui pourrait facilement être pris comme une menace "Je pourrai profiter de ce blog pour donner des indices de ce qui se fait en coulisse, distiller quelques petites anecdotes, évoquer les manies des uns et des autres. Je ne le ferai pas. En tout cas pas maintenant. " Cela se poursuit par une critique des propositions de Didier Reynders pour une nouvelle réforme fiscale chiffrée à plus de 3 milliards : "ce n’est selon moi pas acceptable de privilégier ouvertement les gens qui gagnent vraiment beaucoup par des mesures fiscalement très coûteuses". Le tout accompagné d'un appel " il revient à chacun de montrer sa bonne volonté" ou encore " que chacun accepte qu’en négociation, on ne peut pas obtenir chacun 100 % de nos exigences. C’est la règle dans les coalitions. Ca l’est d’autant plus quand la situation budgétaire est mauvaise". Conclusion du président du PS : il faut un véritable accord détaillé et pas une vague feuille de route comme le suggère désormais MR et VLD.
Si j'en crois mon agrégateur de flux rss ce message a été mis en ligne aux alentours de 18 heures. Elio di Rupo devait à ce moment là se trouver au cabinet Leterme. Il avait sans doute connaissance des dernières déclarations à l'entrée du président MR et a peut être profité d'une suspension de séance (nombreuses dans ce genre de circonstances, soit pour attendre l'avis d'experts, soit pour permettre un tête à tête entre le président de séance et un négociateur) pour taquiner son blackberry . Difficile en tout cas de ne pas y voir une réplique en temps réel aux soubresauts qui pouvaient secouer l'intérieur du batiment.

Le casting de Leterme Ier


Je l’ai déjà souligné sur ce blog : Joëlle Milquet n’exclut plus de monter au gouvernement, et pourrait même envisager de cumuler un temps un poste ministériel avec la présidence de son parti. Ce mardi matin le journal De Tijd croyait l’affaire entendue : Joëlle serait ministre de la justice et présidente croyaient savoir les confrères. La présidente du CDH a dégainé un communiqué particulièrement acerbe ( raison pour laquelle il n'est sans doute pas publié sur le site du parti) à l’égard du quotidien financier indiquant que les "speudo-informations" n'avaient pas été vérifiées auprès du CDH : difficile de démentir plus violement.

La réalité est sans doute plus nuancée. Oui, madame non n’exclut plus de monter au sein de l’équipe gouvernemental. Non, il n’est pas acquis qu’elle puisse cumuler les deux fonctions, une partie de son entourage lui déconseillant même fortement de le faire. Seul un cumul limité dans le temps (pour permettre la préparation d’une élection présidentielle interne) semble envisageable. En cas de cumul prolongé Joëlle Milquet ne pourra plus se plaindre d’un agenda débordé ou vie de famille et vie politique sont parfois en concurrence. Autre nuance à apporter à l’article du Tijd : la justice n’est pas le département le plus envisageable. Ces derniers jours c’est plutôt l’intérieur qui était envisagé, et la présidente humaniste semblait avoir marqué un certain intérêt pour ces matières. Du coté de Patrick Dewael, titulaire actuel du poste, un conseiller concédait même que quitter ce ministère « ne serait pas un drame » pour son patron.

Si Joëlle réfléchit, elle n’est pas la seule. Didier Reynders par exemple aimerait gonfler son portefeuille, histoire de rappeler qu’il est bien le numéro 2 du gouvernement. Outre les réformes institutionnelles le président du MR souhaiterait ajouter le budget aux finances. Scénario idéal dans son esprit : un ministre du budget a l’œil sur toutes les dépenses de ses collègues, et peut même les freiner de temps à autre. Le CD&V n’est pas chaud, la sortie d’Hendrick Bogaert (qui reprochait ce weekend au président du MR de faire trop de choses à la fois) avait peut-être l’ambition de le souligner (signe de crispation : ce député, croisé au parlement reste désormais prudent et se refuse à « en remettre une couche »). A défaut de budget le ministre des finances pourrait recevoir le département des entreprises publiques.

Coté VLD Vincent Van Quickenborn a toutes ses chances de devenir ministre. Au CD&V Inge Vervotte semblait intéressée par le portefeuille de l’emploi mais pourrait finalement conserver ses attributions actuelles.

Pour un casting complet, ajoutez un secrétaire d’état par formation politique. Olivier Chastel pour le MR est le nom le plus cité. S’il devait décliner la proposition le poste pourrait être proposé au FDF (Bernard Clerfaydt est mis en avant par Olivier Maingain) mais cette option n’est pas la seule sur la table (le FDF pourrait ne rien obtenir dans le gouvernement mais avoir l’assurance de conduire la liste aux élections régionales de 2009). Au CDH Melchior Wathelet tient toujours la corde mais les noms d’Anne Delvaux et Maxime Prévost restent régulièrement cités. Karine Lalieux ou Joëlle Kapompole pour le PS pourraient compléter l’équipe, mais l’on sait qu’Elio Di Rupo dans ce genre d’exercice aime provoquer la surprise.

11 mars 2008

Kir a doublé Huytebroeck

La ministre bruxelloise de l'environnement était ce matin mon invitée sur Bel RTL pour évoquer l'inauguration de la station d'épuration Bruxelles Nord. Au cours de l'interview j'interroge Evelyne Huytebroeck sur l'interdiction de circuler dans les espaces boisés bruxellois les jours de tempète (le timing de l'interdiction n'était pas tout à fait celui des rafales) ainsi que sur cette information relevée par la DH : la région bruxelloise imposera le tri sélectif à ses habitants, sanctions à la clef (aujourd'hui le tri est recommandé mais on peut continuer à mettre tout ses déchets dans le sac blanc des ordures ménagères). La ministre reste prudente. Et pour cause : elle ne savait rien du projet du secrétaire d'état en charge de Bruxelles Propreté, le socialiste Emir Kir. C'est un bel exemple d'une version bruxelloise de l'esprit d'équipe.

07 mars 2008

Négocier pour 3, 15 ou 37 mois ?

Les présidents de parti se retrouvent ce lundi après midi auprès d’Yves Leterme pour négocier un programme de gouvernement. Le document, dont la partie socio-économique a été rédigée par Didier Reynders pèse actuellement 22 pages mais devrait être encore largement amendé et complété. Le président du MR indiquait clairement ce matin sur Bel RTL qu’il entendait faire passer dans cette négociation l’essentiel des accords de l’orange bleue ainsi que quelques touches typiquement libérales (l’emploi du terme « réforme fiscale » dans une négociation gouvernementale équivaut à souligner au marqueur bleue les mesures dont le MR revendique la paternité). Bien entendu le PS va s’employer dans les prochains jours à faire la démonstration symétrique, en soulignant de rouge les plans cancer, fonds mazout et autres mesures « sociales ». C’est la logique de l’exercice. Contrairement aux apparences il n’y a rien de contradictoire à combiner des touches bleues et rouges dans un tableau gouvernemental : Guy Verhofstadt fait cela depuis 1999.

La véritable question réside plus dans la capacité de la famille sociale-chrétienne à apporter des nuances oranges clairement identifiables et à faire apparaitre le coup de pinceau d’Yves Leterme. Après tout c’est bien au futur premier ministre qu’il revient d’équilibrer la toile pour pouvoir y apposer sa signature. On mesure là toute la difficulté du défi que se lance le futur premier ministre : ne pas renoncer aux pigments de la NVA, intégrer Joëlle Milquet dans une dynamique de compromis, permettre au PS d’exister sans se mettre à dos les libéraux du nord et du sud.

Ce matin, dans ses déclarations, le président du MR continue de souffler le chaud et le froid. En ironisant sur la perspective de voir Yves Leterme s’installer au département des finances, ou en faisant référence à Guy Verhofstadt le président du MR rappelle sans cesse que l’installation d’Yves Leterme au 16 ne va pas forcément de soi (et donc que cela a un prix). La publication de pleines pages de publicité du MR dans certains journaux samedi fait partie de cette stratégie de pression. Le MR fait ainsi savoir à ses partenaires qu’il est prêt à des élections anticipées, au cas où… Et suggère donc à ses partenaires-adversaires de faire des concessions s’ils veulent éviter le retour aux urnes. A ce stade pourtant, personne ne prévoit que la négociation gouvernementale puisse échouer. Il y aura donc en fin de semaine ou en début de semaine prochaine un accord. Avec le risque que certains paragraphes restent un peu flous. Car la situation politique du moment a ceci de particulier qu’elle nous fourni un gouvernement avant d’en connaître le programme. Même si on ignore si ce gouvernement tiendra jusqu’à l’ultimatum posé par les durs du CD&V (c’est pour juillet, donc dans 3 mois), jusq’aux élections régionales de 2009 (dans 15 mois, hypothèse la plus probable) ou jusqu’au terme de la législature (juin 2011), dans 37 mois

Le CDH et écolo s'agaçent mutuellement


Les écolos ne monteront pas dans le gouvernement Leterme I. A en croire ce communiqué du CDH ce sont les écolos qui auraient refusé. Réplique de Jean-Michel Javaux dans la DH « on attend de Joêlle Milquet qu’elle participe à donner à son équipe de la stabilité et des décisions plutôt que de tenter sans arrêt de semer la zizanie entre francophones ». CDH et Ecolo sont en concurrence frontale. Melchior Wathelet, chef de groupe CDH à la chambre ce matin sur Bel RTL enfonçait le clou « Ecolo a refusé de venir, c’est leur droit , on le respecte mais on le regrette ».

06 mars 2008

Le provisoire est définitif


C’est donc plié. Pour l’instant le gouvernement à 5 reste un gouvernement à 5. Sans me vanter je vous invite à relire les billets précédents, et je me demande si certains journalistes et/ou blogueurs qui annonçaient des législatives anticipées ou un changement de majorité ne devraient pas se cacher derrière leurs claviers.
Yves Leterme, qui joue ici son rôle de patron, a acté l’absence de consensus au sein de sa majorité sur une ouverture aux écolos. Puisque tout le monde ne souhaite pas leur présence, que les écologistes posaient leurs conditions, et que le temps presse, ce sera donc pour une autre fois. Les regrets affichés des autres présidents francophones ne changent pas grand chose à l’affaire.
Dès lundi la pentapartite pourra donc entrer dans le vif du sujet et négocier un programme. Bien sûr on pourra de nouveau s’empoigner et se déchirer sur les priorités des uns et des autres. Un peu de spectacle en vue donc, même si l’on se rappellera que le budget 2008 est bouclé et que toute prévision au delà de juin 2009 est aussi crédible que votre horoscope de ce matin.
En point d’orgue des discussions : la répartition des postes ministériels. Traditionnellement cela fait au dernier moment, juste avant de se rendre chez Albert II, qui, formellement, nomme ses ministres. Cela n’est pas anecdotique : la composition du gouvernement traduira la réalité du rapport de force. La revendication posée ce matin sur Bel RTL par Herman De Croo d’obtenir 4 ministres pour le VLD prend ainsi tout son sens : elle rééquilibrerait la coalition en faveur de la famille libérale.

05 mars 2008

Un peu d'énervement, beaucoup de postionnement


Les présidents de parti se retrouvent ce mercredi midi autour d’Yves Leterme pour discuter de la suite des évènements. Contrairement aux apparences la discussion ne devraient pas être si tendue qu’on veut bien le laisser penser.


Tous les partenaires autour de la table souhaitent rester dans l’attelage gouvernemental : ce souhait est un ciment dont Yves Leterme pourrait tirer parti. Leterme, Verhofstadt et Reynders se sont d’ailleurs vu lundi midi et personne n’a claqué la porte. Sur Bel RTL Jean-Michel Javaux, hier mardi, restait plus que prudent sur une éventuelle participation d’Ecolo. Si Olivier Maingain lors de l'interview sur la même radio ce matin continuait d’ouvrir la porte aux verts il démentait clairement toute velléité de Didier Reynders de débarquer Yves Leterme pour raison de santé ou autre. En revanche le président du FDF n’a pas caché qu’il souhaitait que le CD&V se contente de 3 ministres. Toute l’agitation de ces dernières semaines peut en fait s’expliquer par un double phénomène : un enchainement de déclarations et une guerre d’influence.


L’enchaînement part du retrait de la NVA. Difficile à accepter pour les plus durs du CD&V cela pose un défi électoral au parti d’Yves Leterme. Si le cartel se disloque la place de formation flamande numéro 1 est de nouveau en jeu et Jean Marie Dedecker est assuré de faire une belle progression. Le CD&V, sur un plan électora,l se devait donc de réagir, en soulignant par exemple que le retrait de la NVA n’était pas définitif et aussi en assurant ses électeurs que le programme communautaire n’était pas passé aux oubliettes. C’était logique jusqu’à un certain point, mais laisser dire au chef de groupe du parlement flamand que son parti, sans réforme de l’état conforme à ses désirs, quittait la majorité au fédéral relève de la confusion des genres. Entend-on côté francophone Serge Kubla et Maurice Bayenet dicter leur conduite à Didier Reynders et Elio Di Rupo ?


Le deuxième dérapage CD&V vient de Kris Peeters qui indiquait que faute d’accord il reprenait sa participation budgétaire. A Kris Peeters comme aux autres : un accord est un accord, et la participation budgétaire en question consiste seulement en un gel de montants transférés du fédéral aux régions. Remettre en question ce que l’on vient de signer la veille n’est pas une preuve d’un grand sens de l’Etat.


Troisième temps de la crispation : Didier Reynders accorde vendredi une interview dont il a le secret à La Libre Belgique où il remet la position d’Yves Leterme en cause. Sans doute le président du MR a-t-il été ulcéré par les menaces de Kris Peeters, mais on lui fera la même remarque : un accord est un accord, et ajouter une crispation à une autre ne semble, pour le citoyen lambda, pas franchement nécessaire.


Cette série de déclarations cache un vrai bras de fer sur l’équilibrage interne du futur gouvernement. Logiquement le CD&v est en position de réclamer un ministre supplémentaire (il se dit que cela aurait même été convenu lors des négociations bouclées par Guy Verhofstadt lors de la mise ne place du gouvernement intérimaire, mais je ne peux vérifier ce point avec certitude). Côté libéral on estime que le retrait de la NVA ne justifie plus ce 4ième maroquin.
Didier Reynders qui souligne que sa formation pèse à peu près la même chose que le CD&V réclame donc une compensation. C’est purement logique et arithmétiquement défendable.


Avec une limite : le MR ne pèse pas beaucoup plus que le PS, et bénéficie déjà de la présidence du sénat. Il faut donc arbitrer deux équilibrages : l’un entre francophones et flamands, l’autre entre partis francophones. Question subsidiaire : faut-il ajouter au calcul le poste de commissaire européen de Louis Michel qui court jusqu’en 2009 ? Si oui, le MR est alors déjà bien servi et ne pourrait plus espérer qu’un éventuel secrétariat d’état. Il n’est pas inutile de rappeler ces clefs de lecture pour comprendre ce qui se dira ce mercredi midi.

03 mars 2008

Magnette dément un marchandage sur le nucléaire

Le ministre de l’Energie Paul Magnette était ce matin mon invité sur Bel RTL. IL a démenti l’existence d’un lien entre la « contribution » de 250 millions d’euros réclamée à Electrabel et une éventuelle prolongation de la durée de vie des centrales. L’interview est ici.