26 février 2017

Le LAB trio en parfait équilibre


On pense à E.S.T. Un trio classique (piano , contrebasse , batterie) qui mélange jazz et influences modernes, hip hop inclus, se place forcément sous l'ombre du géant et regretté Esbjorn Svensson. La comparaison est flatteuse mais insuffisante. Si le LAB trio explore les chemins parallèles ouverts par le trio suédois, la tonicité et la couleur musicale sont sensiblement différentes. Plus nerveuse pour les suédois, plus mélodique pour les belges.

Au centre Anneleen Boehme. Une femme à la contrebasse, c'est rare. On pense à Hélène Labarriere qui a travaillé avec Lee Konitz et Sylvain Kassap. Anneleen Boehme joue de bout en bout avec une admirable justesse, là où tant de contrebassistes s'autorisent des glissandos qui masquent un manque de précision. Elle possède un sens du rythme et de la pulsation communicatif. Sur scène Anneleen Boehme endosse la fonction de leader, assurant au micro présentation des morceaux et de ses camarades. Sauf que le LAB n'a pas vraiment de leader. Les musiciens n'y prennent pas de solo et personne n'impose son morceau de bravoure. Pas d'esbroufe mais un tissage collectif, une dentelle subtile pour carresser nos oreilles. Objectif équilibre. On pense aux grands trios d'Oscar Peterson ou de Keith Jarret, quand piano/basse/batterie communiquent d'égal à égal.

A droite,  Lander Gyselinck officie à la batterie. Conservatoire de Gand, trio de Kris Defoort puis le groupe Stuff :   Lander Gyselinck emprunte au hip hop ou au funk des rythmes binaires qu'il met au service d'une musique ternaire. La batterie ne soutient pas, elle complète, organise, magnifie. Le Jazz est son point de départ, mais la destination du LAB trio est plus lointaine. Influence diverses  et créativité, le Jazz s'élargit. On pense au trio de Shai Maestro et à Kamazi Washington.

À gauche Braam De Looze est au piano. Bien mieux exposé dans le LAB que dans Urbex. Avec lui, le clavier est bien tempéré, subtil, aérien, délicat. On s'offre deux incursions du côté de chez Bach (une fugue et une variation Goldberg) et c'est magnifiquement réussi. On pense à Jean-Pierre Rampal, l'un des premiers à avoir fait swinguer la musique  de Jean-Sebastien, mais ce swing là a pris un coup de vieux, la version du LAB nous semble pour le coup bien plus moderne et convaincante. Dans la salle des jeunes gens qui retiennent leur souffle et écoutent les constructions du LAB avec recueillement. Musique religieuse. On pense aux temps héroïques quand le Jazz était ce nouvel évangile qui s'inventait devant un public de connaisseurs. On écoute le troisième disque du LAB trio en se disant que le terme de laboratoire est bien choisi. On pense que le passage des trois  musiciens en studio est conforme à ce qu'on a vu sur scène et que Sony a bien raison de les distribuer. Puis on arrête de penser, et la musique prend toute sa place. 


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