De Mehdi Nemmouche nous connaissions deux photos. La première, prise
par les caméras de surveillance du musée juif de Bruxelles. Casquette devant
les yeux, arme à la main, sac sur le dos. La seconde diffusée par la police
française après son arrestation. Photo bien en face, genre carte d’identité, cheveux
courts, oreilles bien dégagées, regard fier, visage fermé. Un jeune homme en
colère comme il en existe dans les
banlieues françaises ou dans certains quartiers de Bruxelles.
Depuis
ce weekend on sait que Mehdi Nemmouche lorsqu’il se trouvait en Syrie faisait
de temps à autre office de gardien de prison. Pas le gardien débonnaire qui
reste devant la porte et qui vous balance de temps à autre une ration d’eau.
Non, le genre à venir vous tabasser. La séance de torture commençait le soir,
elle s’achevait avec la prière du matin témoigne l’une de ses victimes. Des cris, des coups, de la violence gratuite,
sauf que ce n’est pas du cinéma.
Ce matin
on apprend dans le journal Libération que Nemmouche était rentré en Europe avec
l’idée de commettre un attentat à Paris lors du défilé du 14 juillet. Le musée
juif de Bruxelles n’était pour lui qu’une répétition avant un carnage de plus
grande ampleur encore sur les Champs Elysées.
L’affaire
nous heurte. D’abord elle nous rappelle qu’une photo n’est rien. Seuls les
témoignages, les mots qu’on met derrière, l’émotion qui transparait nous
expliquent l’horreur. L’image seule ne donne pas toujours sens à l’actualité.
Ensuite
on ne peut s’empêcher de se demander combien de Mehdi Nemmouche risquent de
revenir ? Français, allemands, belges, ils sont plusieurs centaines de jeunes
européens à avoir rejoint l’Etat Islamique (rien que pour la Belgique on parle de 200 personnes au moins, y compris des femmes et des enfants). Ces djihadistes voudraient qu’on
les appelle combattants. N'ayons pas peur de leur répondre que l'appellation est usurpée. Alors que nous fêtons les 70 ans de la
libération ou le centenaire de 14/18 il est utile de rappeler qu’un combattant n’est
ni un terroriste ni un tortionnaire. Les viols, les persécutions religieuses,
les images de pendaison, de décapitation qui nous parviennent, ne sont pas l’oeuvre
de combattants. Ce sont des actes de
brutes, de barbares. De fous de Dieu comme ils s’appellent plus proches de la
folie que de Dieu. S’exprimer par la
parole plutôt que par la force c’est le début de l’humanité, et ce devoir d’humanité
s’impose à tous, en particulier lorsqu'on se croit croyant. Les musulmans les plus pieux ne me contrediront pas.
Ce matin
on apprend qu’Iliass Azaouaj aurait été décapité en Syrie. Ce jeune prédicateur
parti d’Anderlecht aurait été soupçonné d’être un infiltré. Un espion parmi les
djihadistse, mais surtout un jeune musulman décapité par d’autres jeunes qui se
disent aussi musulmans. Là un second point de vocabulaire s’impose. Un Etat
protège les siens, assure la prospérité et la justice. Ce n’est pas ce dont on
parle ici. L’Etat Islamique n’est rien d’autre qu’une zone de non-droit, un
territoire livré aux exactions. Ce n’est pas le lieu d’une guerre sainte qui
verrait les musulmans (ici exclusivement les sunnites, rappelons-le) s’opposer au reste du monde, c’est davantage
le champ de bataille où des barbares venus du moyen âge s’opposent à
l’humanité.
Ces
derniers jours beaucoup de rédactions s’interrogeaient
sur la diffusion ou non d’images sanglantes venus de ces zones d’affrontement.
Le questionnement est légitime pour les hommes d’images. L’homme de plume
ajoutera une interrogation sur les termes employés pour rendre compte de ces
exactions. Combattants, Etat Islamique et
même Musulmans, ne paraissent pas les termes adéquats.
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