Nous y sommes. Demain, ou les jours suivants, les écoliers reporteront le cartable. Les politiques eux sont déjà de retour sur les plateaux TV et dans les pages "interviews" des quotidiens. Cela mérite qu'on s'y arrête. Le contenu de ces déclarations le moment ou elles prononcées, et même le média choisi, cela nous dit beaucoup sur les objectifs de communication que s'assigne chaque formation politique. Derrière ces communications on devine un peu de l'image que se font les partis des rapports de force, des attentes du public, de leur propre position sur l'échiquier et donc un peu des stratégies de campagne à venir. Distinguons 4 grandes tendances :
1)Les offensifs
Ce sont ceux qui sont les premiers à prendre la parole. Faire votre rentrée avant les autres, cela permet d'essayer de donner le "la" et d'obliger les autres à se positionner autour de vos propositions. C'est la stratégie suivie par le Mouvement Réformateur où Charles Michel puis Didier Reynders ont accordé leur interview de rentrée dès la semaine dernière. Les mauvaises langues glisseront que le MR pouvait ainsi mettre un terme aux polémiques du mois d'août (Gaëlle Smet, Jacqueline Galant) pour réorienter le débat. Cela indique une volonté de corriger son image, de se repositionner, ou tout simplement de commencer à peser sur la campagne. Limite de la formule : sortir le premier c'est parfois sortir trop tôt, quand tous les électeurs ne sont pas rentrés.
2) Les Sphinx
Ce sont ceux qui décident d'en dire le moins possible. Quand les choses marchent, que vous êtes persuadé que votre image est bonne, il faut surtout ne pas vous abîmer dans des déclarations qui constituent toujours une prise de risque. Le sphinx ne fait pas d'interview de rentrée. Au pire il le fait en dernier, après tout le monde, histoire de marquer son autorité. Cette technique est depuis longtemps celle d'Elio Di Rupo : pour la rentrée de septembre, comme pour les voeux de janvier, l'homme au noeud papillon intervenait après tous ses camarades. Cette année, outre le premier ministre, Paul Magnette et Bart De Wever appliquent la communication du sphinx : aucune interview à ce stade. Le patron de la NVA a même indiqué à une consoeur qu'elle ne pouvait pas attendre une interview avant 2014. Limite de la posture : se taire vous donne un caractère hautain, méprisant, et en cas de problèmes vous paraitrez éloigné des difficultés.
3) Les opposants et leurs cibles
Il en va des interviews de rentrée comme des autres déclarations : les nuances s'évaporent, les petites phrases perdurent, surtout quand elles ciblent vos adversaires. L'interview sert alors à cliver le débat, à souligner les lignes de fractures. C'est ce à quoi s'emploient Emily Hoyos et Ecolo : se poser fortement en opposition avec le Mouvement Réformateur. Ce n'est pas qu'un différent idéologique. Certes Ecolo et le MR n'ont sans doute pas la même vision économique et budgétaire. Mais en tentant d'isoler le MR (en mettant le financement de l'école au centre de l'attaque) Ecolo renforce l'Olivier... Limite de la tactique : cela ressemble à un sauvetage de dernière minute, et on attend que les autres partis se positionnent. Si Benoit Lutgen a raillé la réforme fiscale Columbo du MR on ne sent pas la même ferveur.
4) Les francs-tireurs
Dans tout parti, la communication est un dosage subtil entre les consignes présidentielles et les aspirations personnelles. Les interviews de rentrée c'est aussi l'occasion de jouer une carte personnelle, pour mettre en avant un accent particulier et espérer soigner sa notoriété. Les médias adorent les petites musiques originales, qui passent parfois pour des couacs dans la belle mélodie partisane. Siegfried Bracke vient de nous en livrer un bel exemple en plaidant pour un gouvernement fédéral plus soucieux d'économie que de réformes institutionnelles. Coté francophone Alain Destexhe essaye de jouer une partition ouvertement sécuritaire, flirtant avec des thèmes utilisés par des partis peu démocrates. Avec une différence : la ligne Siegfried a été immédiatement corrigée par Bart De Wever. Alain Destexhe, comme le souligne Marcel Sel, bénéficie du silence de son président.
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