
La Belgique présente-t-elle une valeur ajoutée ? On se souvient que l'affirmation contraire figurait dans
une fameuse interview accordée à Libération par Yves Leterme. Un peu moins d'un an plus tard il était donc légitime de reposer la question à celui qui s'apprête à devenir premier ministre. Ce qu' a fait la RTBF. Au risque de déplaire à la hiérarchie de RTL, mais il faut vivre dangereusement, je vous invite donc à visionner
ce reportage inspiré de Christophe Deborsu diffusé samedi soir.
Yves Leterme ignore visiblement la symbolique du 21 juillet (incapable de préciser qu'il s'agit de la date de prestation de serment de Leopold 1er, mais c'est aussi le cas de Rudy Demotte, et Guy Verhofstadt aura besoin d'un temps de réflexion). Plus spectaculaire encore : lorsqu'on lui demande de chantonner la Brabançonne... c'est le premier couplet de la Marseillaise qui sort de ses lèvres.
On peut bien sûr imaginer qu'Yves Leterme a voulu faire de l'humour au second degré. Cela ne serait qu'une faute de goût. Le premier couplet de la marseillaise une provocation.
J'ai peur que le malaise soit plus profond. Jeudi matin j'avais moi même tenté de sonder l'attachement du formateur à la date du 21 juillet, alors qu'il sortait d'un entretien avec Albert II. Cela avait donné ceci :
"-Assisterez vous aux festivités du 21 juillet ?
- Oui.
- Cette date revêt elle une importance particulière pour vous ?
- C'est la fête nationale."
Réponse courte, passons à autre chose. Leterme s'en tenait au service minimum. La nomination de Rudy Demotte comme ministre-président wallon suscitait davantage d'émotion dans ses réponses qu'une date symbolique. Le thème du 21 juillet l'avait donc déjà mis sur la défensive. Coincé 24 heures plus tard par un confrère incisif, le malaise est réel et visible.
Lorsqu'il avait participé au grand défi Yves Leterme avait reconnu dans les couloirs, une fois les micros éteints, que son interview à Libération lui avait appris une chose : le second degré ne passe pas en politique. La leçon n'a pas été retenue longtemps.
Bien sûr on m'objectera qu'un homme politique ne peut pas avoir réponse à tout. La toute puissance de la presse dans ce genre de circonstances peut s'assimiler à une dictature du reporter, qui s'arroge le droit de coincer dans les cordes le premier élu qui passe par là. Etre saisi au vol avec une caméra qui tourne n'est pas agréable, et on peut admettre qu'Yves Leterme soit accaparé par d'autres réflexions ces derniers jours. Je ne nie pas que l'immense pouvoir du reporter et de sa caméra peuvent aboutir à des dérapages. Mais dans le cas présent les interrogations du journaliste apparaissent légitimes. Nous ne sommes toujours pas sûrs que le futur premier ministre aime le pays qu'il prétend vouloir diriger. Nous conseillerions volontiers à quelques négociateurs francophones de lui poser franchement la question.